Ces artères du monde d’aujourd’hui ou comment irriguer les gazoducs sans discontinuité
Une contribution de Saadeddine Kouidri – Avant octobre 2023, on souhaitait l’indépendance de la Palestine, du Sahara Occidental et de tous les pays colonisés. Mais, depuis quelques jours, on souhaite avant tout la sauvegarde des populations de Gaza. J’ai écrit mille et une fois que le colonialisme de peuplement est synonyme de génocide et que, logiquement, l’indépendance ne vient qu’après avoir survécu à ce dernier, comme en Algérie. Le fait que n’ayant jamais inscrit cette survie comme une victoire de la résistance des peuples sur les génocides du capitalisme occidental, dans l’histoire, nous ne pouvions pas prendre conscience que le combat des Palestiniens aujourd’hui est d’abord une résistance au capital+300% que dirige Netanyahou et «Génocide Joe».
Karl Marx (1818-1883) disait : «Le capital a horreur de l’absence de profit. Quand il flaire un bénéfice raisonnable, le capital devient hardi. A 20%, il devient enthousiaste. A 50%, il est téméraire. A 100%, il foule aux pieds toutes les lois humaines et à 300%, il ne recule devant aucun crime.»
S’il avait voulu mériter son surnom, il aurait ajouté : comme celui commis dans les colonies et qui a transformé la classe politique dominante occidentale en anthropophage et qui, depuis des siècles, continue de dévorer les colonies et les ex-colonies, de les dépouiller de leurs richesses matérielles et immatérielles. L’avidité s’est imprégnée en eux comme une première qualité de leur «humanisme», jusqu’à l’enseigner à leurs chérubins, comme ceux qui bombardent Gaza depuis des mois.
Nous appartenons à un univers où les astronomes viennent d’identifier un trou noir qui absorbe l’équivalent d’un soleil par jour. Dans ce cas, le trou noir s’éclaircit ou s’assombrit en avalant une lumière ? Ce «sacrifice» du soleil aurait-t-il un lien avec le sacrifice terrestre, celui d’Abraham ?
Les juifs avaient abandonné le sacrifice du mouton, à juste titre écrivait Mohammed Dib, jusqu’au jour où les évangélistes chrétiens, ces descendants des génocidaires des Amérindiens, les ont regroupés en Palestine en leur disant que ses habitants sont comme les moutons. Vous connaissez la suite.
Le capitalisme est un processus en développement depuis des siècles. Son profit dépasse souvent les 300% qui l’empêchent d’arrêter ses crimes. La question est comment stopper ce processus ou, du moins, comment le stopper au niveau de la témérité.
Le génocide que pratique Israël sur les Palestiniens a été dénoncé par la CIJ le 26 janvier 2024, qui a influencé des pays dits puissants, jusqu’aux votes majoritaires en faveur d’un cessez-le-feu que seul le veto des Etats-Uniens et par la suite son vote négatif, l’unique à l’ONU, a fait échouer. On constate que le monde a fini par mettre la plus grande puissance criminelle du monde au banc des accusés par la Cour internationale de justice qui répondit, non pas à la justice, mais à un rapport de force en faveur des peuples. Ce n’est certes pas suffisant, mais c’est un début d’espoir du bannissement des «Génocide Joe», qui nous encourage à poursuivre.
Comment consolider cet acquis ne relève pas de la morale, mais de faits vivants, comme celui du secteur public qui, tout en étant moins performant, à cause de dirigeants qui sont dans les deux sphères à la fois, est plus utile à la majorité que le secteur privé plus performant, mais où le profit est grand mais ne profite qu’à une infime minorité. Celle-là même qui pousse à la guerre. On a des hommes plus riches que des nations, où des citoyens manquent de nourriture et de logement. Les politiciens de ces nations ne dénoncent pas cette injustice ; ils dénoncent des «abus» de leurs voisins russe, chinois, turque, algérien. Ils ne dénoncent pas le massacre des Palestiniens ; ils l’approuvent et font la guerre à tous ceux qui veulent suivre une autre voie que celle qui mène au génocide.
Pour continuer à faire la lessive des mots, il faut rappeler que le génocide arménien a été commis par l’empire ottoman lors de la Première Guerre mondiale. Après leur victoire, la Grande-Bretagne et la France se partagent des colonies de l’empire (la Syrie et le Liban pour la France et l’Irak, l’Arabie et la Palestine pour la Grande -Bretagne), mais échouent à s’emparer de la Turquie qui, elle, résiste par une guerre de libération menée par Mustapha Kamel. Ce dernier, après la victoire, est gratifié plus tard du nom d’Atatürk. Si la France accuse la Turquie du génocide des Arméniens, c’est parce qu’elle a échoué face à sa guerre de libération. En tant que puissance coloniale, la France n’admet pas la défaite, alors, elle la poursuit par une guerre des mémoires, comme pour l’Algérie. A ma connaissance, la Turquie ne revendique pas le génocide, la France si ; elle est même fière du massacre des Africains, puisqu’elle promeut ses génocidaires et ses tortionnaires à des postes politiques comme Le Pen et des généraux dans l’armée, tout en qualifiant sa colonisation de civilisatrice par son Parlement.
Cette semaine, il y a peut-être des Algériens qui se demandent pourquoi tant de mobilisation autour du forum de gaz. Il ne s’agit pas d’une simple rencontre, mais de la consolidation des acquis du secteur public. Les producteurs de gaz veulent s’assurer que le prix de leur matière soit plus ou moins stable en toute circonstance. Pour cela, ils doivent se concerter plus souvent et régulièrement pour maintenir le profit des intermédiaires dans les normes qu’ils se fixent.
Le problème est comment irriguer les gazoducs, ces artères du monde d’aujourd’hui, sans discontinuité et en toute sécurité, au profit du producteur et du consommateur à la fois. Seule la concertation permet aux producteurs de ne pas brader sa plus-value qui est fournie non seulement par une richesse naturelle, mais aussi par un travail de haute technicité, d’installations complexes, de beaucoup d’investissements de l’Etat. L’enjeu est comment améliorer la plus-value, tout en la pérennisant.
Pour cela, Le 7e Sommet, des chefs d’Etat et de gouvernement du Forum des pays exportateurs du gaz naturel, le GECF, déclare à Alger rien moins que de «préserver les intérêts des producteurs et des consommateurs». Il faut peut-être rappeler que le gaz n’a pas toujours été indexé sur le pétrole. Son prix était beaucoup plus bas que ce dernier. A ce sujet, le défunt Chadli Bendjedid en avait parlé au Saoudien Ahmed Zaki Yamani. En l’écoutant, le visage de ce dernier s’imprégnait d’un sourire en coin, en guise de réponse négative. Je ne sais pas exactement depuis quand le gaz est indexé sur le pétrole, par contre, je sais que, par la voix du secrétaire général du GECF, qui a déclaré que «l’âge d’or du gaz naturel est bien devant nous et non derrière nous», et non pas le contraire, comme le prétendent les producteurs européens du nucléaire et leurs acolytes, dont leurs écologistes politiques.
S. K.
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