Un centre émirati l’admet : «Le projet de gazoduc Nigeria-Maroc est irréalisable»
Par Kamel M. – C’est ce qu’admet le centre d’études Al-Mostaqbal, dans une analyse énumérant les difficultés qui rendent la réalisation du chimérique gazoduc Nigeria-Maroc impossible. Le think tank émirati ne fait que confirmer ce que tout le monde sait, en réalité, mais que le Makhzen s’entête à présenter comme un projet faisable. «Bien que soit mise en avant l’importance de la canalisation qui doit relier le Nigeria au Maroc puis à l’Europe et les opportunités que ce projet présente, il n’en reste pas moins qu’il existe de nombreux défis qui empêchent sa concrétisation sur le terrain», relève Al-Mostaqbal.
Le centre émirati évoque, en premier lieu, des entraves d’ordre politique, traduites par «l’absence de stabilité dans les pays du Sahel, qui vivent une aggravation de la situation sécuritaire». «Une situation due à l’instabilité des régimes politiques de transition issus de coups d’Etat, notamment au Mali, au Tchad, au Burkina Faso et au Niger, et leur incapacité à garantir la stabilité politique souhaitée», précise le centre, selon lequel cet état de fait est compliqué par la «faiblesse des moyens sécuritaires et militaires pour venir à bout des activités terroristes, d’autant que ces dernières ont servi d’argument aux militaires putschistes pour renverser les régimes en place».
Les difficultés sécuritaires sont, dès lors, une des raisons qui font que le projet en question ne puisse pas voir le jour. «Les entraves sécuritaires liées aux menaces et aux dangers terroristes induits par la recrudescence des activités de certaines organisations, notamment Daech, Al-Qaïda et Boko Haram, constituent un grand défi face à l’exécution dudit projet, tant l’infrastructure sera une cible privilégiée pour ces groupes armés», souligne l’étude d’Al-Mostaqbal, qui aborde également le nerf de la guerre, c’est-à-dire le financement.
«Des rapports techniques relatifs à ce projet relèvent la présence de difficultés financières», note l’analyse du centre émirati. «D’un côté, il y a la difficulté pour le Nigeria et le Maroc de fournir les liquidités indispensables pour son exécution et, de l’autre, se pose le problème du coût de l’infrastructure qui devra être construite dans les treize pays par lesquels passe le gazoduc», explique le centre. «Bien qu’il soit question de financements prévus par la Banque européenne d’investissement, des experts estiment que la réalisation du projet pourrait prendre entre 25 et 50 ans, vu le volume gigantesque de l’infrastructure qui doit le supporter», souligne le centre émirati, selon lequel les Etats européens, tout en affirmant leur soutien au projet, n’ont jusqu’à présent annoncé officiellement ni un apport financier ni leur intention d’y investir.
A ces trois écueils s’ajoutent les «craintes quant aux conséquences qui seront induites par la participation de treize Etats à ce projet, notamment de probables contentieux commerciaux et économiques, vu le nombre élevé de pays associés», préviennent les experts. Ces problèmes prévisibles sont dus à l’incapacité de certains pays traversés par le gazoduc à honorer leurs engagements, avertissent ces experts, cités par Al-Mostaqbal qui conclut son étude par de «graves problèmes écologiques» provoqués par le passage de la canalisation par l’océan Atlantique. Chose qui soulèvera la colère des militants écologistes et des organisations régionales et internationales de défense de l’environnement, qui feront valoir les lois relatives à la protection des ressources naturelles et de la faune marine.
K. M.
Comment (40)