La solidarité d’un Algérien avec le Français d’aujourd’hui
Une contribution de Saadeddine Kouidri – On connaît toutes et tous la situation des habitants de leurs banlieues, ces Français des plus démunis, dont la majorité est originaire de leurs colonies et qui, malheureusement, n’étaient pas nombreux ce samedi 15 juin à la place de la République. Après le 9 juin, c’est toute la France qui risque de rejoindre leur précarité sans un sursaut révolutionnaire, à cause de la politique de la droite et de la social-démocratie, non pas, suite à la dissolution de l’Assemblée nationale seulement, mais par la longue pratique politique des pouvoirs successifs de diviser les forces de la gauche pour y instaurer le règne de la finance dont l’essence est le gain principalement dans les guerres et l’exploitation de la richesse des peuples
L’historien Olivier Le Cour Grandmaison écrivait : «Alors qu’en France les héritier-e-s de ce passé colonial continuent d’être soumis à des discriminations systémiques qui affectent gravement leur vie quotidienne et compromettent durablement leur avenir, il est temps de solder les comptes en reconnaissant, enfin, cette histoire et en faisant de la lutte contre ces discriminations une priorité politique.» Il s’avère qu’un tel conseil judicieux reste à ce jour inaudible, parce qu’il ne dénonce pas le premier facteur de la démobilisation des forces vives qui est dans le déni, des victoires des anticolonialistes, y compris français, qui favorise l’extrême-droite depuis des décennies jusqu’à permettre à un tortionnaire comme Le Pen d’être à la tête d’un parti dont ses héritiers sont, aujourd’hui, à la porte de Matignon. Quand on ajoute à ce déni le paradoxe spécifique à la gauche que souligne l’historien : si la direction du Parti communiste continue de défendre, dans L’Humanité, l’extension des droits et libertés démocratiques aux colonies, elle n’en approuve pas moins l’interdiction, décidée le 26 janvier 1937 par le gouvernement de Léon Blum, de l’Etoile nord-africaine dirigée par Messali Hadj.
Le PCF, entre autres forces de gauche, a de tout temps revendiqué ce qui doit améliorer la vie de la citoyenne et du citoyen. Malgré cela, il a de moins en moins de voix aux élections. Si le PCF a 2% ce 9 juin 2024 aux européennes, c’est parce que sa direction laisse sous-entendre que le citoyen ne vit pas dans le monde mais juste dans son coin en ville ou dans son lopin de terre à la campagne et, par conséquent, il se suffirait du minimum vital que l’Etat bourgeois est sommé le lui fournir puisque ses revendications depuis un siècle sont en priorité dans la hausse des salaires, retraites, logement… qui laissent à penser que même la majorité des communistes ne sont toujours pas conscients de l’importance de la lutte des peuples contre le colonialisme.
C’est une des raisons qui a fait que les libéraux et les socio-démocrates occidentaux ont damé le pion au communisme occidental, jusqu’à accompagner l’extrême-droite à l’antichambre du pouvoir. C’est à cause de l’inconscience de la lutte pour la liberté de dizaines de millions de gens esclavagisés, indigénisés… depuis des siècles qui ne sont pas français mais dont la majorité des peuples, y compris des Français, s’en soucient. Dans ce cas le Front populaire uni doit avoir dans son programme non seulement la prise en charge des banlieues mais revendiquer aussi les indépendances de tous les pays colonisés dont la Palestine et la Nouvelle Calédonie, s’il veut battre l’extrême-droite et la droite.
Hier, au temps de l’Union populaire, c’est l’ENA qu’on interdisait le 26 janvier 1937 et Messali, son président, qu’on emprisonnait. Aujourd’hui, c’est Hamas que l’armée israélienne cherche à assassiner pendant que les Etats-Unis peaufinent l’union du diable avec l’accord d’Abraham pour effacer la cause palestinienne.
Le système capitaliste compte sur l’oubli et le mensonge diffusé H24 sur leurs petits et grands écrans pour perpétrer ses crimes contre les peuples. Quand leurs médias informent sur Gaza, par exemple, le génocidaire israélien du peuple palestinien est présenté comme une victime du Hamas. Ils ont été capables de transformer, aux yeux des Occidentaux, la victime palestinienne en bourreau, jusqu’à assourdir les propos les plus simples : les Anglais qui colonisaient la région ont décidé de créer un foyer juif sur la terre de Palestine dont le peuple ne cesse de résister pour demeurer sur sa terre. Malgré une résistance meurtrière, l’impérialisme a réussi à créer Israël pour le peupler d’étrangers à la région, de juifs exclusivement.
Pour perpétuer sa domination, l’impérialisme réactualise l’identité religieuse dans le monde et booste le fanatisme que les résistances populaires avaient estompé. Israël va donner l’occasion aux évangélistes de revendiquer Jérusalem comme capitale à la fois d’Israël et de la spiritualité juive et chrétienne. Il faut rappeler que leur lobby évangéliste domine le Sénat états-unien. Les pays laïcs, comme la France embourbée, dans l’islam politique et du problème du genre jusqu’à vouloir en imposer un troisième, tout en mettant en vedette des minorités non pour les libérer mais dans le but de nuire à leur liberté, ne trouvent rien à redire parce qu’Israël sert en priorité à entretenir la division et permettre aux royaumes arabes, ces néocolonisés, riches en matières premières dont les hydrocarbures pour perpétuer leur domination dans la région qui a vu naître les trois religions monothéistes, facteurs de conflits millénaires que le capitalisme arrive à manipuler opportunément.
La présence du pape au G7 à Bari, en Italie, cette semaine est le énième pas du retour officiel du religieux dans la politique internationale qui encourage le clergé à épauler l’extrême-droite dans l’exaspération des conflits et perpétuer les guerres avec la bénédiction de leurs saints. Pour ne pas tomber dans les pièges, nous invitons nos camarades français à condamner la politique de deux poids, deux mesures qui sert à brouiller perpétuellement la vue du citoyen et revenir aux fondamentaux qui commencent par la revendication de l’indépendance des peuples colonisés et la reconnaissance de l’engagement et l’héroïsme de leurs propres anticolonialistes, étudiants, syndicalistes, militants et intellectuels dont Jean-Paul Sartre fut l’une des figures de proue lors de la Révolution algérienne.
S. K.
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