Recep Tayyip Erdogan : maîtrisez l’atome avant de discourir !

Turquie entité
Recep Tayyip Erdogan. D. R.

Une contribution de Khaled Boulaziz – Depuis la création d’Israël en 1948, la Turquie entretient une relation complexe et évolutive avec l’entité sioniste. La Turquie a été parmi les premiers pays à la reconnaître, établissant des liens diplomatiques en 1949. Cette reconnaissance précoce a posé les bases d’un partenariat unique et multifacette, caractérisé par des périodes de coopération et de tension, influencées par la géopolitique régionale, les politiques intérieures et les développements mondiaux.

Contexte historique : 1948-2000

Dans les premières années, les relations turco-israéliennes étaient largement motivées par des intérêts stratégiques mutuels. Les deux pays se trouvaient dans une région majoritairement hostile, ce qui a conduit à une coopération dans des domaines tels que le renseignement, le militaire et le commerce. Pendant la Guerre froide, l’alignement de la Turquie avec les puissances occidentales et le partenariat stratégique d’Israël avec les Etats-Unis ont renforcé leurs liens bilatéraux. La coopération économique a prospéré, avec des accords commerciaux et des contrats militaires devenant des éléments centraux de leur relation.

Cependant, cette relation n’était pas sans défis. Les liens de la Turquie avec le monde arabe et son leadership dans le monde islamique la mettaient souvent en opposition avec les politiques israéliennes, en particulier concernant la question palestinienne. Malgré ces tensions, le besoin pragmatique de coopération stratégique a souvent éclipsé les différences idéologiques, permettant à la relation de perdurer et d’évoluer.

L’ère de l’AKP et les changements dans la politique étrangère turque

L’arrivée au pouvoir du Parti de la justice et du développement (AKP) en 2002 a marqué un tournant significatif dans la politique étrangère turque. Sous la direction de Recep Tayyip Erdogan, la Turquie a commencé à adopter une politique étrangère plus assertive et indépendante, cherchant à étendre son influence au Moyen-Orient et à réaffirmer son rôle en tant que puissance régionale. Cette nouvelle approche incluait une position plus vocale sur la question palestinienne, entraînant des tensions accrues avec Israël.

Plusieurs événements clés ont encore détérioré les relations turco-israéliennes durant cette période. Les opérations militaires israéliennes à Gaza, en particulier la guerre de Gaza de 2008-2009 (opération Plomb durci) et le raid de la flottille de Gaza en 2010, où des commandos israéliens ont tué neuf activistes turcs à bord du navire Mavi Marmara, ont conduit les relations au bord de la rupture. Le gouvernement d’Erdogan a condamné ces actions, entraînant une rupture diplomatique significative et une dégradation des liens bilatéraux.

Développements récents et position d’Erdogan

Malgré des tentatives occasionnelles de rapprochement, les relations turco-israéliennes restent marquées par des tensions, influencées par les dynamiques plus larges de la géopolitique du Moyen-Orient et les considérations politiques intérieures des deux pays. Les récentes déclarations d’Erdogan, menaçant d’une action militaire en soutien à la Palestine, ont encore compliqué la situation. Ses propos ont suscité un large débat et des spéculations sur les actions futures de la Turquie et les conséquences potentielles pour la stabilité régionale.

Les déclarations d’Erdogan marquent une phase offensive avancée qui nécessite des actions décisives, et non plus seulement des paroles. Il a déclaré : «Tout comme nous sommes intervenus à Karabakh et en Libye, nous pouvons faire de même avec Israël (faisant référence à une intervention militaire). Nous devons juste être forts pour faire ce pas.» Cette proclamation audacieuse reflète une escalade significative dans la position de la Turquie et soulève des questions cruciales sur les implications pour les relations turco-israéliennes et le paysage plus large du Moyen-Orient.

Considérations stratégiques et intérieures

La rhétorique agressive d’Erdogan peut être vue à travers le prisme de considérations à la fois stratégiques et domestiques. Sur le plan stratégique, Erdogan vise à positionner la Turquie en tant que puissance dominante dans le monde musulman, en défendant la cause palestinienne et en défiant les politiques israéliennes. Cette approche s’aligne sur les ambitions régionales plus larges de la Turquie et son désir d’affirmer son influence au Moyen-Orient.

Sur le plan intérieur, les déclarations d’Erdogan résonnent avec sa base politique, qui soutient fermement la cause palestinienne et critique Israël. En adoptant une position dure, Erdogan cherche à galvaniser le soutien et à détourner l’attention des défis internes, y compris les difficultés économiques et l’opposition politique.

Cependant, la rhétorique d’Erdogan comporte également des risques significatifs. Une intervention militaire contre Israël représenterait une escalade drastique aux conséquences imprévisibles. Cela pourrait provoquer une réponse sévère d’Israël, déstabiliser davantage la région et tendre les relations de la Turquie avec ses alliés occidentaux, notamment les Etats-Unis.

Réactions régionales et internationales

Les déclarations d’Erdogan ont suscité des réactions variées de la part des acteurs régionaux et internationaux. Dans la région, certains Etats arabes, en particulier ceux ayant des liens plus étroits avec Israël à la suite des Accords d’Abraham, ont exprimé des préoccupations quant au potentiel d’instabilité accrue. En revanche, des groupes et des Etats opposés à Israël, tels que le Hamas et l’Iran, ont accueilli favorablement la rhétorique d’Erdogan, y voyant un possible changement dans l’équilibre des pouvoirs régionaux.

Sur le plan international, les déclarations d’Erdogan ont suscité des alarmes parmi les alliés de l’OTAN et d’autres pays occidentaux. La perspective d’une confrontation militaire turco-israélienne est perçue avec une grande inquiétude, compte tenu du potentiel de conflit régional plus large et des implications pour la sécurité mondiale.

La voie à suivre

Les récentes déclarations d’Erdogan soulignent la volatilité et la complexité des relations turco-israéliennes. Alors que les deux pays naviguent dans un paysage géopolitique en rapide évolution, l’avenir de leur relation reste incertain. Erdogan fait face à une décision cruciale : suivre ses menaces d’intervention militaire, avec tous les risques que cela comporte, ou chercher une approche plus pragmatique qui équilibre ses ambitions domestiques et régionales avec les réalités de la diplomatie internationale.

Les mois à venir seront cruciaux pour déterminer la trajectoire des relations turco-israéliennes. Les enjeux sont élevés et les conséquences potentielles des décisions d’Erdogan se feront sentir bien au-delà des frontières de la Turquie et d’Israël, façonnant l’avenir du Moyen-Orient et de l’ordre international plus large.

Cependant, il est important de noter que cette déclaration pourrait s’avérer être un coup d’épée dans l’eau, compte tenu du fait que la Turquie ne possède pas d’armes nucléaires, contrairement à l’entité sioniste. Cette réalité limite considérablement la capacité de la Turquie à influencer la situation par la force militaire seule, soulignant la complexité des défis auxquels Erdogan est confronté. Dans ce cas, il est plus louable de se taire que de donner de faux espoirs au peuple palestinien qui vit le martyr.

K. B.

 

 

Comment (14)

    Aucun Risque
    1 août 2024 - 8 h 00 min

    C’est pas lui qui a accepter la présence de TEL AVIV en AZERBAÏDJAN 🇹🇷 ?
    Aucun Risque
    Il fait juste le BUZZ Comme les Frères musulmans du Maroc.🇲🇦 qui couchent tous les soirs avec Netanyahu

    Anatole France
    31 juillet 2024 - 23 h 21 min

    Que la Turki commence par fermer son espace aérien à tous les aéronefs du GHETTO youpin génocidaire!

    Il serait bon que la Jordanie et surtout l’Arabie ferme aussi leur espace aérien à tous les aéronefs du GHETTO youpin génocidaire!

    Quant aux Zémi Rats, il n’y a rien à attendre!

    Anonyme
    31 juillet 2024 - 16 h 45 min

    @ Erdogan
    Tu as perdu une belle occasion pour saker foumek!
    Les sionistes t’ont répondu on dirait bien.

    Mohamed El Maadi
    31 juillet 2024 - 11 h 32 min

    Il est faux de dire que les relations économiques sont au beau fixe avec Israël, certainement au début de l’année 2024, mais ce n’est plus le cas. Erdogan a une base qu’il écoute et doit écouter pour l’avenir de son parti. 

    Je rejoins le titre de l’article, car le titre avec sa concision dit tout de la relation entre Israël et la Turquie. 

    Sans la bombe atomique, tu ne peux pas avoir la moindre autorité, c’est ce que je m’ai expliqué ici !

    L’Algérie qui n’a pas pris la juste valeur de l’effondrement du bloc soviétique est dans le même cas !

    À quoi demander à l’ONU quand on sait que seule la puissance atomique est l’atout suprême. 

    Pourquoi croyez-vous que les puissances nucléaires ont un veto à l’ONU ? 

    Et Dieu sait que si nous avions patienté aujourd’hui, nous serions une puissance atomique, mais à cette époque, nous avions deux faiblesses : l’une politique et l’autre un peuple rebelle qui, au bout de six mois d’embargo, aurait mis le feu au pays juste pour manger. 

    Malheureusement, on n’a pas le bon peuple pour donner à l’Algérie son éclat véritable.

      Anonyme
      31 juillet 2024 - 16 h 38 min

      @Mohamed
      Ton commentaire est méprisant envers tes compatriotes, tu ne fais pas partie du peuple ?
      Les Algériens s’adaptent très bien partout où ils émigrent, pourquoi est ce qu’ils ne pourraient pas s’adapter dans leur propre pays, s’il existait une justice sociale ?
      Les zawalis en Algérie ont une attitude très humble et même admirable,en France on se suiciderait si avec les mêmes conditions.

      [email protected]
      31 juillet 2024 - 17 h 03 min

      Faire confiance à ce (…) ni fou ni loi Erdoghan c’est mal connaître ce troubloin qu’est le suppositoire de k’Oran ! Cet enrhumé est prêt à vendre sa mère pour sa survie politique et économique tfouuuuu

    Abou Stroff
    31 juillet 2024 - 10 h 44 min

    « Les récentes déclarations d’Erdogan soulignent la volatilité et la complexité des relations turco-israéliennes. » souligne K. B..

    je pense que, contrairement aux apparences et au discours creux qui camouflent des intérêts inavoués, parce qu’inavouables, erdogan et le parti qu’il dirigent sont en phase avec netanyahou et la politique sioniste de l’entité sioniste.

    je splike:

    si nous faisons abstraction de la rhétorique qui ne coûte pas le moindre kopeck, les intérêts bien compris du mouvement islamiste turc dirigé par erdogan et les intérêts de l’entité sioniste dirigée par netanyahu sont tout à fait convergents, pour ne pas dire identiques.

    en effet, la mouvance islamiste et la mouvance sioniste ont l’objectif déclaré de construire des Etats régis par la religion. par conséquent, l’érection ou la construction d’Etats où la religion régit les relations sociales ne peut que servir les deux mouvances car, l’existence de l’une justifie et entérine l’existence de l’autre.

    en termes crus, si l’érection d’Etats islamiques s’intègrait dans la psyché des individus lambda comme une normalité, au nom de quoi refuserions nous l’existence d’un état ……………juif?

    moralité de l’histoire: je pense que les intérêts de la turquie d’erdogan et ceux de l’entité sioniste sont tout à fait convergents et que le seul hic à négocier entre ces deux puissances est le partage du monde dit « arabo-musulman’ qui passe d’un maître à l’autre (du colon anglais à l’impérialiste américain au sous-impérialiste turc ou au sous impérialiste sioniste) grâce aux couches sociales compradores qui le dominent, l’exploitent, l’asservissent à leur profit et au profit des puissances qu’elle servent.

    wa el fahem yefhem.

    PS : le fait que la turquie d’erdogan n’a pas quitté l’otan (outil de domination de la puissance impérialiste yankee) dont l’entité sioniste est le bras armé dans la région du moyen-orient, montre clairement que les intérêts de la turquie d’erdogan sont en phase avec les intérêts bien compris des puissances impérialo-sionistes.

    Oud
    31 juillet 2024 - 9 h 45 min

    T . . Depuis le conflit de Gaza les échanges commerciaux avec l entité sioniste n a jamais etait aussi florissante. . Les chiffres eux ne mentent pas ..
    Faite un article sur les domneh juif de Turquie qui controle le pays et ceci expliquera cela ..

    Anonyme
    31 juillet 2024 - 9 h 18 min

    Il parle beaucoup et buisness encore plus avec ses « ennemis ».
    Les turcs ne se prosternent que devant l’argent….

    Anonyme
    31 juillet 2024 - 9 h 14 min

    Erdogan est un bel hypocrite !
    Ne vous faites pas d’illusions, c’est un faux ami!

      Anonyme
      31 juillet 2024 - 12 h 46 min

      On attend vos arguments.

        Anonyme
        31 juillet 2024 - 19 h 12 min

        Comme tout à chacun,on observe le passif de l’individu, son CV, et là, on sait comment il pense,quels sont ses intérêts.
        On peut même aller plus loin et analyser la mentalité turque.
        Les Turcs sont des suprémacistes dans le monde musulman, ils méprisent les Arabes et leur ont longtemps tourné le dos.
        On peut même remonter jusqu’à l’empire ottoman, notamment en Algérie, où ils étaient tout sauf protecteurs, ils ont même « donné les clés » à l’envahisseur français.
        Plus récemment, la Turquie courrait après l’Europe pour y être intégrée,sa candidature était parmi les premières.
        La Turquie voulait faire bonne figure jusqu’à répéter, sans cesse, » nous ne sommes pas des Arabes ! ».
        Jusqu’au au jour, où la désillusion est arrivée !
        La Turquie reste sur le banc des candidats alors que l’Europe va chercher des pays « crève la faim » comme la Roumanie et la Bulgarie pour les intégrer.
        L’humiliation finale pour la Turquie !
        Elle ne peut plus se tourner vers l’Occident et méprise l’Orient, alors quoi faire ?
        La solution, un revirement conservateur islamiste pour retrouver sa fierté face à l’Europe, et en même temps, pour se réconcilier avec les voisins Arabes,non sans arrière pensées. Effectivement, la Turquie a grand besoin des petro-dollars des riches monarchies du Golfe.
        De plus, Erdogan a compris que l’emplacement stratégique de la Turquie, trait d’union entre l’Occident et l’Orient, peut lui donner un pouvoir diplomatique très fort, d’où l’état d’esprit girouette d’Erdogan et le fait de manger dans tous les râteliers, pour ses uniques intérêts.

        Ai-je été assez précis ?

        Bonne soirée.

          Anonyme
          2 août 2024 - 19 h 41 min

          “Les turques détestent les arabes.” Comme le dit un dicton bien de chez nous: “khalat rouhek maâ enoukhala, yengbek edjej.” Et comme le dit un certain commentateur “lifehem yefhem” et j’ajouterais ouala effahem khouh.

          Anonyme
          4 août 2024 - 8 h 44 min

          @Anonyme du
          31 juillet 2024 – 19 h 12 min
          Belle analyse de la situation et bonne réponse à ceux qui demandent des arguments et qui n’en ont aucuns à mettre dans le débat !

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