Dominique de Villepin à propos de Gaza : «Nous sommes pointés du doigt par un deux poids deux mesures»
Par Kahina Bencheikh El Hocine – Invité à réagir à la nomination de Michel Barnier comme chef du gouvernement français, l’ancien Premier ministre français et ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin s’est lâché sur la chaîne du service public, France Inter, estimant qu’aujourd’hui la France n’a plus de voix sur la scène internationale. Pour lui, la gauche est frappée par «un mal que nous connaissons tous qui est l’idéologie et, pour en sortir, il faut la confronter à la réalité».
Parmi les sujets chauds qui attendent le nouveau locataire de l’Hôtel de Matignon, De Villepin a cité l’immigration, en exhortant Barnier à prendre l’exemple sur la Première ministre italienne, Giorgia Meloni.
«Sur l’immigration, on n’est pas obligé de partir à l’emporte-pièce pour faire la politique de l’extrême droite. Il y a en matière diplomatique un domaine que je connais bien, sur ce point-là, et encore une fois, c’est Georgia Melloni qui nous montre l’exemple», a-t-il fait savoir en informant que les Italiens «ont baissé de 65% les arrivées. Comment ? On ouvre les accords avec les pays d’origine», a-t-il indiqué, en ne cachant pas la complexité de la situation, notamment en ce qui concerne les relations en dents de scie qui existent entre l’Algérie et la France.
«C’est là que cela se complique, car cela suppose peut-être qu’on retrouve la possibilité de parler avec l’Algérie. Il y a un certain nombre d’Algériens dans les centres de rétention administrative, tout simplement, nos relations sont exécrables avec l’Algérie, compte tenu de l’initiative prise par le président Macron», a-t-il avoué en notant que, pour faire de la politique, il faut prendre des initiatives, mettre les choses sur la table et accepter de prendre les problèmes de front.
«Aujourd’hui, nous n’avons plus de voix sur la scène internationale. Nous avons l’Ukraine qui est en train de se dégrader, nous avons Gaza qui est, sans doute, le plus grand scandale historique depuis, je n’ose même pas trouver de référence historique, et dont plus personne ne parle dans ce pays. C’est le silence, la chape de plomb, les médias n’en parlent plus», a-t-il accusé violemment, en affirmant que «pour trouver une brève du nombre de morts à Gaza, je suis obligé de googler».
«C’est un véritable scandale sur le plan de la démocratie. Et tout cela au nom de quoi ? Au nom de la guerre. Ah c’est la guerre, c’est comme ça ! Je veux bien, mais ce n’est pas une guerre comme les autres à Gaza puisque ce sont les populations civiles qui meurent», s’est plaint De Villepin pour qui la France est devenue un territoire où l’absurde est roi. «On est en absurdie et la France s’efface. C’est la France qui est en train de payer l’addition et, ça, moi je ne peux l’accepter».
Coupant la parole assez sèchement à la journaliste qui a rapporté le nombre de morts tués par l’entité sioniste génocidaire à Gaza, en le qualifiant de «chiffre du Hamas», De Villepin a répliqué vivement en indiquant : «J’entends cela en permanence. Il n’y a pas que le Hamas qui dit qu’il y a plus de 40 000 morts, il y a probablement beaucoup plus. Ne donnons pas le sentiment que ce chiffre est tronqué, non ! Malheureusement, c’est une réalité de tous les jours.»
«A Gaza, les corps sont en morceaux, les cœurs sont en morceaux, les âmes sont en morceaux et les têtes sont en morceaux et l’idée de reconstruire tout cela alors qu’il n’y a aucune perspective. Il faut voir qu’Israël est en train de créer les conditions de réoccupation de Gaza.»
Pour lui, il y a des leviers militaires et économiques pour arrêter le plan diabolique de l’entité sioniste derrière le pogrom palestinien à Gaza et en Cisjordanie, «mais nous refusons de le faire sous des arguments absolument inouïs sur le plan culturel et intellectuel. Il n’y a pas d’objectif politique de la part d’Israël. Il y a un objectif sécuritaire, un objectif identitaire et une folie messianique, ce qui explique cette catastrophe qui nous est donnée de voir. Le monde regarde tout cela et en tire les conclusions. Et c’est en cela que nous, Français, nous Européens, nous Occidentaux, sommes pointés du doigt par un deux poids deux mesures qui ne pourra être sauvé que par le Droit international et le retour de la justice. Nous aurons à payer comptant en termes d’efforts et de légitimité notre droit à reparler et redonner des conseils en matière internationale».
K. B. E. H.
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