Cinq vetos, zéro paix
Par A. Boumezrag – Depuis sa création en 1945, le Conseil de sécurité des Nations unies est censé incarner l’espoir d’un monde pacifié. Cependant, la réalité actuelle révèle un tableau bien plus sombre. Avec cinq membres permanents dotés d’un pouvoir de veto, ce Conseil, censé être le gardien de la paix mondiale, apparaît de plus en plus comme un instrument de blocage, laissant derrière lui un triste bilan de souffrances humaines et de conflits non résolus. Le constat est accablant : cinq grands, cinq vetos, zéro paix et, en conséquence, le silence des morts.
Le Conseil de sécurité, composé des Etats-Unis, de la Chine, de la Russie, du Royaume-Uni et de la France, se retrouve souvent paralysé par des intérêts nationaux divergents. Ce qui devait être un forum de coopération et de résolution des conflits s’est transformé en un champ de bataille diplomatique où le droit de veto devient l’arme privilégiée des grandes puissances. En réalité, ce droit, qui aurait dû garantir la stabilité, est devenu un frein à l’action, permettant aux puissants de bloquer toute résolution qui ne sert pas leurs intérêts.
Les exemples de cette impasse sont légion. En Syrie, en Yémen, en Libye et au-delà, des millions de civils subissent les conséquences de la guerre et de la violence, tandis que le Conseil reste en grande partie inactif. Les résolutions proposées, pourtant pleines de promesses, se heurtent souvent à l’intransigeance d’un ou plusieurs membres permanents, laissant la paix en attente et les conflits s’enliser.
La lenteur du processus décisionnel et l’inefficacité du Conseil de sécurité ont des répercussions tragiques. Chaque jour, des populations innocentes payaient le prix de cette inaction. Leurs voix, leurs souffrances, et même leurs vies semblent souvent réduites à un silence assourdissant, ignoré par ceux qui détiennent le pouvoir. Ce silence est celui des morts, de ceux qui ne peuvent plus être sauvés, de ceux dont les espoirs de paix ont été étouffés par l’ambivalence et l’inaction.
Les débats et les résolutions, bien qu’ils soient souvent riches en rhétorique, sont dénués de véritables conséquences sur le terrain. Les dirigeants du Conseil de sécurité, au lieu d’être des artisans de paix, deviennent parfois des témoins complices d’un cycle de violence et de souffrance. La diplomatie, qui devrait être une voie pour la résolution des conflits, devient un prétexte pour prolonger l’inefficacité.
Il est urgent de réévaluer le rôle et le fonctionnement du Conseil de sécurité. Les appels à la réforme ne manquent pas, mais ils se heurtent à la résistance des grandes puissances qui bénéficient du statu quo. Si le Conseil ne parvient pas à dépasser ses mécanismes obsolètes et à répondre efficacement aux crises contemporaines, il risque de perdre définitivement la des nations qu’il était censé protéger.
La paix mondiale ne peut plus être un slogan creux. Elle exige des actions concrètes, une solidarité réelle et une volonté collective de remettre l’humanité au cœur des décisions. Si les grands du Conseil de sécurité continuent à privilégier leurs intérêts égoïstes au détriment du bien commun, ils devront faire face à la conséquence de leurs choix : le poids de ce silence, celui des morts, qui continue de s’alourdir.
Le Conseil de sécurité est à un carrefour critique. Sa capacité à assumer son rôle de protecteur de la paix dépend d’un changement radical dans sa dynamique de fonctionnement. Les cinq grands doivent se rappeler que leur pouvoir s’accompagne d’une responsabilité. La paix ne peut plus attendre, et les voix des vivants doivent résonner plus fort que le silence des morts. Seule une action déterminée et un engagement sincère peuvent rompre ce cycle de désespoir et redonner espoir à ceux qui en ont tant besoin.
Un Conseil de sécurité qui ignore les crises des victimes devient un complice silencieux de la guerre.
K. B.
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