Démasquer la farce française et les tromperies de l’Algérie vichyste d’Attali
Une contribution de Khaled Boulaziz – «La vérité est rarement pure, et jamais simple.» (Oscar Wilde.) Une énième sortie de Jacques Attali (1), drapé d’un faux humanisme, pleurnichant sur le sort des juifs d’Algérie, lui qui, au cours de toute une année, est resté indifférent aux crimes commis par ses coreligionnaires en Palestine.
Cette énième tentative d’Attali de s’ériger en voix morale est non seulement incohérente, mais elle est également construite sur des fondations de duplicité et de révisionnisme historique. Dans L’Année des dupes : Alger 1943, Attali se dépeint comme le défenseur d’un passé qu’il interprète à travers le prisme déformé de ses propres hallucinations, prétendant que l’Algérie sous Vichy était un prolongement de la haine antisémite française, avec la complicité passive, voire active, de la population algérienne elle-même. Pourtant, son discours masque une réalité bien différente : ce qu’il présente comme une «Algérie de Vichy» n’est en fait qu’un drame franco-français, une sinistre pièce coloniale jouée sur le sol algérien.
Quelle hypocrisie que de se lamenter sur le sort des juifs en Algérie, tout en fermant les yeux sur les exactions contemporaines, sur les spoliations et violences perpétrées contre le peuple palestinien par des forces soutenues par ce même Occident. Attali, par son œuvre, se fait non pas historien mais faussaire, imposant à l’histoire algérienne une lecture qui n’a pour but que de sanctifier la culpabilité française, tout en excluant le peuple algérien de sa propre histoire. L’Algérie des Algériens, que l’occupant vichyste ne dirigeait pas mais opprimait, se voit réduite ici à une simple toile de fond pour des intrigues franco-françaises.
Il est impératif de révéler la fausseté de ce récit, de restaurer l’honneur et la mémoire d’une Algérie qui, loin d’être complice, n’a jamais été sous le joug de Vichy, mais bien sous celui d’un colonialisme français obsédé par son propre pouvoir.
Introduction
L’Algérie qu’évoque Jacques Attali dans L’Année des dupes : Alger 1943 est une fiction obscure, un palimpseste d’intérêts européens, écrit sur une terre et un peuple complexe qui, une fois de plus, a été réduit au silence par un récit trop simple. L’Algérie des Algériens – jamais occupée par les Allemands, jamais collaboratrice des actes impitoyables du régime de Vichy – se voit faussement confondue avec un récit centré sur la France, fait de complicité et de trahison. La prétention selon laquelle l’influence de Vichy aurait pénétré jusqu’au cœur et à l’esprit des Algériens est non seulement erronée mais constitue une insulte profonde à la vérité de l’histoire algérienne.
Cette «Algérie de Vichy», telle que la présente Attali, n’était qu’un drame franco-français joué sur le sol algérien, indifférent à l’esprit algérien qui, en vérité, n’a jamais consenti à ce spectacle. Cet essai soutient donc que l’Algérie sous Vichy était un problème «franco-français», une imposition coloniale dans laquelle les Algériens eux-mêmes sont restés, pour la plupart, non impliqués dans les actes odieux de répression envers leurs voisins juifs – ces mêmes voisins juifs qui, il faut le souligner, avaient déjà été arrachés au tissu social algérien par le décret Crémieux.
Motif
Ce sujet mérite notre attention non seulement en raison de l’affront d’Attali à la mémoire de l’Algérie, mais aussi à cause d’une tendance insidieuse, présente chez certains universitaires, à vouloir recadrer la lutte propre à l’Algérie à travers un prisme européen, dénaturant ainsi l’identité algérienne. L’idée selon laquelle l’Algérie vichyste aurait impliqué les Algériens eux-mêmes en tant que participants moraux ou oppresseurs actifs de leurs concitoyens juifs est une fausseté, une distorsion nourrie par l’hypothèse selon laquelle les régimes coloniaux agissent comme des représentants moraux des colonisés. C’est une distorsion qu’il faut démêler et confronter, car ce qui est en jeu ici, c’est l’intégrité même de l’identité historique algérienne.
Vichy comme conflit français et non algérien
Pour commencer, l’argument d’Attali, imprégné de l’histoire égocentrique de la France coloniale, est dépourvu de la nuance nécessaire pour comprendre la réalité vécue des Algériens. Attali dépeint une Algérie prétendument imprégnée d’antisémitisme, comme si ce sentiment avait été partagé et soutenu par la population locale. Il omet commodément que ces politiques antisémites ont été décrétées et appliquées non par les Algériens, mais par les autorités coloniales nommées par Vichy, des hommes dont la loyauté était uniquement tournée vers la France. Ces fonctionnaires ont étendu leur propre législation raciste, faisant du sol algérien le théâtre d’un spectacle français de bigoterie. Comment Attali ose-t-il impliquer les Algériens dans ce spectacle odieux, une performance dans laquelle ils n’étaient pas des acteurs mais des témoins captifs ?
Dans ce «conflit franco-français», Vichy ne se souciait que de son propre pouvoir. Il ne s’agissait pas d’une répression endossée par les Algériens ; c’était une obsession coloniale provoquée par la paranoïa raciale du régime français, un régime qui continuait de considérer l’Algérie simplement comme un échiquier sur lequel imposer sa volonté impériale. Suggérer le contraire revient à accuser les opprimés des péchés des oppresseurs.
La citoyenneté française aux juifs d’Algérie
Dans cette manipulation coloniale flagrante, Attali voudrait nous convaincre que les Algériens furent complices des torts infligés à ces mêmes citoyens juifs sous le régime de Vichy. Aurait-il oublié que le décret Crémieux n’était rien d’autre qu’un outil de contrôle français et non algérien ? Ou choisit-il sciemment de passer sous silence cet élément fondamental pour renforcer son récit d’une Algérie prétendument empreinte d’antisémitisme – un récit qui, bien opportunément, minimise la responsabilité de la France dans cette division et cette persécution ? Le décret Crémieux fut, en vérité, promulgué pour remercier les juifs d’Algérie des «services rendus» à la colonisation et à la pacification forcée du pays.
L’implication minimale des Algériens dans les actes répressifs de Vichy
Abordons directement la réalité historique : le peuple algérien n’a jamais été activement impliqué dans l’application des lois raciales de Vichy. Sous le poids oppressif du colonialisme, les Algériens n’avaient ni le pouvoir de dicter les conditions de leur propre existence, encore moins de s’engager dans la répression administrative de leurs voisins. Tandis que les fonctionnaires français imposaient leurs lois infâmes, les Algériens restaient des témoins silencieux, préoccupés non pas par l’application de la haine de Vichy, mais par la survie dans un cauchemar colonial qui les avait privés de terres, d’autonomie et de dignité. L’idée que les Algériens auraient joué un rôle significatif dans les politiques antisémites de Vichy est une fiction, un mensonge propagé par ceux qui cherchent à imputer une complicité algérienne là où il n’y avait en réalité que subjugation coloniale.
L’insulte de la révision historique : la prétention d’une «libération» de l’Algérie en 1943
Comme si cela ne suffisait pas, nous assistons aujourd’hui à une insulte encore plus grave –une révision historique qui imprègne certains cercles académiques, où l’on prétend que l’Algérie a été «libérée» en 1943 par des participants juifs lors de l’opération Torch, le débarquement des Alliés en Afrique du Nord. Suggérer que cette opération militaire, menée par les forces alliées dans un but purement européen, ait constitué un acte de libération algérienne est non seulement une absurdité mais un affront profond à la véritable histoire de l’indépendance algérienne. Les débarquements alliés ont peut-être renversé le régime de Vichy, mais n’ont, en aucun cas, libéré l’Algérie. En effet, ces forces étrangères n’ont fait que changer les maîtres du joug colonial de l’Algérie, tandis que les Algériens eux-mêmes sont restés enchaînés et non libres.
«Quelle amère ironie de suggérer que l’Algérie ait été libérée non par son propre peuple mais par des mains étrangères qui n’avaient pas le moindre intérêt pour la liberté algérienne. Torch n’a pas libéré l’Algérie ; ce n’était que le réaménagement des pouvoirs coloniaux, un prélude à la poursuite de l’occupation et de l’exploitation des terres et du peuple algériens. Ce récit – comme celui d’Attali – sert uniquement à effacer la véritable lutte pour la libération, celle qui éclatera une décennie plus tard, lorsque les Algériens se lèveront, enfin, pour récupérer leur patrie.»
L’hypocrisie des réparations et de la reconnaissance
Enfin, considérons les réparations financières que l’Allemagne, dans un rare acte de responsabilité, a versées aux juifs d’Algérie en reconnaissance de leurs souffrances sous les politiques de Vichy. Comme l’histoire a généreusement compensé certains tout en laissant d’autres porter le fardeau de l’effacement. Pendant des décennies, des livres ont été écrits, des conférences tenues, des réparations accordées – tous des efforts pour redresser les injustices passées. Pourtant, ces actes, loin de reconnaître la souffrance algérienne, servent à obscurcir l’oppression endurée par le peuple algérien lui-même. Où sont donc les réparations pour les Algériens qui ont vécu sous un double joug – d’abord le joug colonial, puis celui de la guerre ? Cette mémoire sélective révèle une vérité troublante : aux yeux de l’héritage colonial, certaines vies sont jugées dignes de mémoire et de réparations, tandis que d’autres sont condamnées à l’invisibilité perpétuelle.
Conclusion
Nous sommes donc laissés avec un récit qui continue d’obscurcir la réalité algérienne, un récit qui met au centre la culpabilité française et la rédemption européenne, tandis que les Algériens restent à la périphérie – utilisés, mal représentés et oubliés. Le récit d’Attali, et les discours académiques qui lui font écho, font de l’Algérie un simple décor pour les drames de la France coloniale, comme si la terre elle-même n’avait ni volonté, ni histoire, ni lutte propre. Cette «Algérie de Vichy» est une illusion, une diversion – une histoire écrite par des étrangers qui ne comprennent, ni ne respectent la vérité de la résilience algérienne.
L’Algérie n’a jamais été sous Vichy ; elle était sous le joug colonial, et sa libération est venue non pas des mains des Alliés mais grâce au courage inflexible de son propre peuple, une décennie plus tard. Laissons donc ces distorsions commodes au passé et honorons, enfin, le véritable héritage d’une Algérie qui a toujours été plus qu’un pion dans des mains étrangères. L’Algérie des Algériens – indomptable, défiant et, surtout, digne de sa propre histoire sans détours.
K. B.
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