Le cas Sansal rappelle le comportement insolent de Mitterrand envers l’Algérie
Par Karim B. – L’attitude condescendante de l’élite politique et intellectuelle française suite à l’affaire Boualem Sansal, si elle peut étonner quelques-uns, n’est, en réalité, que le continuum naturel d’une classe dirigeante néocoloniale dont les aiguilles de la montre se sont arrêtées au 14 juin 1830, réveillant sans cesse le souvenir de leur ancêtre, le compte Louis de Bourmont et, plus près, de leur président François Mitterrand qui «ordonnait» aux autorités algériennes de laisser le FIS prendre le pouvoir.
Cet épisode de l’histoire contemporaine des relations entre l’Algérie et la France a été rappelé par l’ancien ministre de la Défense nationale, le défunt général Khaled Nezzar, dans un passage de ses Mémoires, intitulé «Au nom du verdict des urnes». Nous le portons à la connaissance de nos lecteurs, tant il traduit on ne peut mieux l’état d’esprit paternaliste qui anime ceux qui, en ce moment même, s’agitent en brassant du vent, de l’autre côté de la Méditerranée.
«Pour la bonne cause de la démocratie et des droits de l’Homme, la France des trucages électoraux, du code de l’indigénat et de la misère pour tous les Algériens, exprime bruyamment son sentiment lorsque la montée des intégristes vers le pouvoir est contrecarrée par l’intervention de l’armée algérienne. Derrière cette sollicitude bruyante transpirent des ressentiments inassouvis et des rancunes tenaces. François Mitterrand, ministre de l’Intérieur sanglant pendant la Guerre d’Algérie, pourvoyeur généreux de la machine du bon docteur Guillotin, silencieux devant de la torture et les fosses communes, se découvre soudain une vocation d’avocat du peuple algérien et l’exprime par une phrase concise et comminatoire : il faut rétablir le processus démocratique !
Ces grands politiques partisans du respect de la règle du jeu démocratique en Algérie et qui feignent de ne pas comprendre la nature, les moyens et les buts de l’islam radical, savent leur opinion publique façonnée, depuis longtemps, dans une hostilité larvée envers l’Algérie. Tout s’y mêle : l’immigration envahissante, les causes du chômage des Français expliquées par Jean-Marie Le Pen, les dealers à l’entrée des immeubles, les voitures qui brûlent dans les parkings, les rues aux abords des mosquées occupées par les prieurs du vendredi, la prolifération du halal. Cette ancienne colonie, ce pays improbable de l’autre côté de la Méditerranée, ravagé par le «fanatisme et la paresse de ses habitants», ne mérite que l’intégrisme.
Les orphelins de «l’Algérie de papa» qui érigent des monuments à la gloire de l’OAS et baptisent des rues et des places pour perpétuer le souvenir de ses tristes exploits, en trépignant d’impatience de voir l’objet de leur haine sombrer dans le chaos, les négateurs des exactions de l’armée française pendant la guerre de Libération nationale, les glorificateurs de la colonisation, les héritiers du va-t-en-guerre Guy Mollet, une presse orientée ou friande d’apocalypses, de grands noms de la classe politique traditionnelle, il n’y a plus de clivages quand il s’agit de l’Algérie. L’Algérie gomme les frontières partisanes et unit. Ils s’attendaient à une victoire du FIS et en la défaite de celui qui les a boutés hors d’Algérie, le FLN. Leur réaction est à la mesure de leur déception.
Les Algériens découvrent que le projet médiéval que les fous de Dieu veulent imposer par le sabre et la Kalachnikov ne pose aucun problème d’ordre moral aux fougueux puristes de la démocratie. L’essentiel est le respect du verdict des urnes. Qu’importe si la légitimité d’Hitler a provoqué le plus grand carnage de l’histoire. Les Algériens, argumentant avec les mots de l’école française des lumières, ne comprennent pas que les valeurs qui font la grandeur de la France s’arrêtent aux frontières de l’Hexagone.
Dans peu de temps, quand les GIA commenceront leurs tueries de masse, nos vertueux censeurs prêteront une oreille complaisante à ceux qui diront que l’armée acculée tue et massacre pour s’accorder un sursis, que le terrorisme est une fabrication des généraux et que le peuple algérien a basculé dans son immense majorité du côté des intégristes.
Les Algériens, confrontés à l’hostilité ou à l’incompréhension, tentent, en vain, d’expliquer que l’islamisme rétrograde et sectaire, conjonction de religiosité et de terreur, en poursuivant la culture et la science, la liberté de conscience et la démocratie, empêche tout progrès, fragilise les structures de l’Etat, précipite l’effondrement économique, dévitalise les liens sociaux, réduit la femme à l’effacement social, provoque la division, pousse les élites à l’exil et les populations à l’exode.»
K. B.
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