Un Marocain se plaint des services secrets algériens à Obama
Le ridicule et la démesure prêtent à rire en donnant tous deux, à leur auteur, la liberté de faire n’importe quoi. Par exemple, prendre prétexte d’une lettre de félicitations à Barack Obama après sa réélection à la tête des Etats-Unis pour se livrer à des élucubrations anti-algériennes sur un sujet aussi sérieux et sensible que la situation au Nord-Mali, à la frontière de notre pays. «Le président délégué aux affaires internationales de l’Assemblée mondiale amazighe» a réussi cet exercice peu commun, il faut le reconnaître. Son association, basée à Rabat, au Maroc, et qui prétend défendre «les droits des peuples amazighs», se propose de se mêler d’affaires qui la dépassent. Le ridicule est dans cette ambition, la démesure se trouve dans les accusations lancées contre les services secrets de notre pays. Bien que sur ce point, l’Association basée au Maroc n’innove pas du tout. Son «président délégué aux affaires internationales», dans la lettre qu’il adresse au président des Etats-Unis, prend comme références à ses divagations des sites et des articles qui, avec le temps et à l’épreuve des faits, ont perdu toute crédibilité. Il ne suffit pas de qualifier ces écrits d’«études», tantôt «excellentes», tantôt «pertinentes» pour qu’elles soient revêtues de la marque du sérieux. En quelques phrases, le «défenseur des droits des peuples amazighs» règle son compte à l’intégrité territoriale d’un pays voisin, le Mali, et appelle les Etats-Unis à s’attaquer à la stabilité du nôtre, l’Algérie. La démarche de ce «président délégué aux affaires internationales» prend, ici, les allures d’une véritable farce. Il est utile de relever que l’Assemblée mondiale amazighe tient ses assemblées générales et autres réunions au Maroc, avec certainement la bénédiction royale. Elle est née d’une scission du Congrès mondial amazigh, intervenue en décembre 2011.
Lazhar Houari
Ci-après le texte intégral de la lettre adressée au président américain. Nous la publions telle quelle, sans correction :
«A Son Excellence,
M. Barack Hussein Obama
Président des Etats Unis d’Amérique
Objet : Félicitations pour votre réélection et interpellation au sujet du conflit malien
Monsieur Le Président,
Au nom de notre organisation l’Assemblée Mondiale Amazighe, une ONG qui défend les droits des peuples amazighs, nous tenons à vous exprimer toutes nos félicitations pour votre réélection à la tête des Etats Unis d’Amérique et vous souhaitons plein succès dans ce nouveau mandat.
Monsieur le Président,
Vous avez affirmé, à plusieurs reprises, que la question de la lutte contre le terrorisme est l’une des priorités de votre agenda politique. Aussi, permettez moi d’attirer votre attention au sujet de l’intervention militaire imminente qui se prépare, dans l’Azawad, au nord du Mali. Cette intervention risque de se transformer en un génocide maquillé, tout particulièrement, contre nos populations touarègues. Si cette intervention, voulue et orchestrée par le président français, François Hollande, plus soucieux des intérêts économiques de son pays que des droits du peuple touareg, et cela à travers la mise en place d'une armée des Etats africains néo-coloniales-, se faisait sans la collaboration et l’implication directe des révolutionnaires du Mouvement National pour la Libération de l’Azawad (MNLA), afin de déloger les terroristes islamistes, aurait des conséquences désastreuses et irréversibles dans le Sahel, en Afrique du Nord (Tamazgha) et dans les pays occidentaux.
Les vrais dirigeants terroristes salafistes (AQMI, MUJAO et Ansar Eddine), qui occupent les principales villes du nord du Mali (Tombouctou, Gao et Kidal) et s’affrontent directement contre les révolutionnaires du MNLA ne se trouvent pas dans l’Azawad. Ceux qui déstabilisent réellement toute la zone du Sahel sont plutôt à Alger et non dans les montagnes de Tighargharin !
Aussi, si vous êtes décidé à combattre efficacement le terrorisme en Afrique du Nord et au Sahel, vous devriez commencer par diligenter une enquête approfondie au sein des services secrets de l’armée algérienne, ancienne SM (Sécurité Militaire) devenu DRS (Département du Renseignement et de la Sécurité). Le vrai chef d’AQMI (Al Qaïda au Maghreb Islamique) n’est pas Abdelmalek Droukdel, mais les généraux qui contrôlent la DRS ; vous pouvez voir à ce sujet, l’excellente étude de François Gèze et Salima Mellah : www.algeria-watch.org/fr/aw/gspc_etrange_histoire_intro.htm ) qui affirment que: « en dehors du secteur des hydrocarbures, la seule institution qui fonctionne vraiment… Quadrillant la société, contrôlant une part importante du commerce extérieur, nommant nombre de hauts fonctionnaires, y compris parmi les ambassadeurs, infiltrant les médias, la police, les entreprises d’État, les partis politiques et les groupes islamistes armés, soupçonnée d’être derrière plusieurs attentats et de multiplier les coups tordus, elle désinforme et manipule l’opinion comme, d’ailleurs, les présidents à coup de rapports volontairement erronés ou faussement alarmistes» c’est la DRS. D’autres études pertinentes telle que celle de l’universitaire britannique Jeremy Keenan (http://www.rue89.com/2010/08/09/germaneau-la-main-de-lalgerie-dans-le-fiasco-militaire-francais-161541 et http://www.tamazgha.fr/Le-role-du-DRS-dans-ce-qui-se.html ), de l'anthropologue de CNRS Hélène Claudot-Hawad et de Djameleddine Benchenouf, de l’Université de Lyon, convergent vers les mêmes conclusions : l’AQMI ne serait que l’émanation du GSPC (Groupe Salafiste pour la Prédication et le Combat), qui à son tour, ne serait que la continuation des GIA (Groupes Islamiques Armés), et qui au fond ne sont que des créations des services secrets militaires algériens.
La plupart des grands chefs des mouvements sanguinaires précités, coupables de milliers d’assassinats de citoyens et d’intellectuels innocents, que ce soit Djamel Zitouni, Hassan Hattab, Antar Zouabri ou Nabil Makhloufi (chef d’AQMI au Sahara mort le 9 septembre dernier) sont bizarrement d’anciens militaires algériens !
Ce qui est pour le moins curieux c’est que ces terroristes se concentrent dans deux régions amazighophones d’Algérie, à savoir la Kabylie et le pays Touareg.
Les terroristes salafistes (AQMI, MUJAO et Ansar Eddine),- qui appliquent directement la « charia » et terrorisent la société civile, avec comme victimes principales des femmes touarègues, battues et humiliées en plein public-, ne sont que des marionnettes à la solde des agents militaires algériens qui essayent à de déstabiliser à tout prix cette région du Sahara, qui était autrefois l’une des régions les plus sûres au monde et les plus hostiles à toute forme d’extrémisme islamique.
Monsieur le Président,
Venir à bout des groupes terroristes salafistes au Sahel ne peut se faire qu’à condition d’impliquer les révolutionnaires du MNLA dans toute opération militaire ; ce qui suppose de reconnaître le droit à l’autonomie de l’Azawad dans le cadre d’un Etat fédéral malien. Voir à ce sujet :
http://charqi.blog4ever.com/blog/lire-article-379408-9516728-l_azawad_entre_droits_des_peuples_a_disposer_d_eux.html ).
Par ailleurs, il conviendrait de forcer à l’ouverture d’une enquête internationale urgente portant sur les archives de la DRS algérienne, afin de délimiter les responsabilités et de traduire les coupables devant la justice internationale. Ce n’est pas normal qu’après l’assassinat de 126 civils amazighs de la Kabylie pendant le « printemps noir de 2001», aucun responsable algérien ne soit traduit en justice, ni même Hassan Hatab qui court paisiblement dans les rues, tandis que le cynisme du pouvoir algérien, à travers le nouveau ministre algérien de l’intérieur, Ould Kablia, insulte directement les amazighs de la Kabylie en les traitant d’avoir contribué à la prolifération du terrorisme islamiste d’AQMI !
En vous remerciant de votre diligence, dans l’intérêt que vous porterez à cette missive, veuillez agréer, Monsieur Le Président, l’assurance de notre considération fort distinguée.
Signé : Rachid Raha
Président délégué pour les Affaires Internationales de l’AMA»
(Suivent coordonnées personnelles)
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