Me Miloud Brahimi : «La corruption a tendance à se démocratiser»
L’avocat Miloud Brahimi, membre fondateur de la Ligue algérienne des droits de l’Homme (LADH), exprime son étonnement en entendant parler de campagne de lutte contre la corruption. Non pas qu’il doute de la volonté du gouvernement de combattre ce fléau, mais parce que «la corruption a toujours existé et existera encore». Invité par la Chaîne III de la Radio nationale, cet avocat de renom estime que ce phénomène ne connaît pas une propagation exceptionnelle, préférant plutôt parler de l’effet médiatique. Il y a eu, d’après lui, des affaires de corruption passées sous silence. Mais celle de Sonatrach bénéficie d’une forte médiatisation qui a eu forcément un impact sur l’opinion nationale et internationale. «Ce fléau n’est pas plus important en Algérie qu’ailleurs ni plus aujourd’hui qu’hier. La corruption est ce qu’elle est. Elle a été ce qu’elle a été et tant qu’il y aura des hommes et dans tous les pays, la corruption existera», a-t-il insisté. Il affirme que les campagnes de lutte contre la corruption reviennent de manière épisodique tous les quinze ans pour marquer un moment de l’histoire politique mouvementée. Ce sont des campagnes à fort caractère politique. «Pour le professionnel que je suis, et depuis que j’exerce ce métier, je note trois campagnes dites anti-corruption». La première a été lancée au début des années 80 contre les cadres gestionnaires issus de l’ère du président Boumediene. La seconde a été menée au milieu des années 90, en pleine période de terrorisme, contre des cadres de Sider et Cosider. La troisième est celle en cours actuellement au sein et autour de Sonatrach. Mais cette dernière, il la considère plutôt comme «un dérapage que le pouvoir n’a pas pu contrôler». Me Brahimi précise qu’il ne cherche nullement à justifier ces phénomènes de corruption. «Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit. Je suis le premier à avoir dénoncé publiquement l’affaire Khalifa où j’avais dit dans ma plaidoirie que la corruption était un sport national, et précisément un sport d’élite qui a tendance à se démocratiser, mais c’est pour moi l’occasion de préciser que la lutte contre la corruption doit être celle de tous les jours et non circonstancielle», a-t-il souligné. Cet avocat craint qu’à force de parler de corruption généralisée, le petit peuple finira par croire que tout est permis dans ce pays. Ce qui n’est pas vrai, assure-t-il.
Sonia B.
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