Amnesty dénonce l’hypocrisie du Traité sur les armes
Dans leur hâte à en finir avec les obstacles qui se dressent sur leur chemin, les pays occidentaux ne s’embarrassent pas de contradictions, et plus leurs objectifs sont contrariés et moins ils ont de scrupules vis-à-vis du droit international qu’ils brandissent pourtant quand cela les arrange. Hier (lundi 3 juin), au siège des Nations unies, à New York, plus de 60 pays ont signé le Traité sur les armes (TCA), qui est considéré comme le premier accord appelé à réguler le commerce d'armes dans le monde. «Le fait qu'un si grand nombre de pays ont signé le traité dès que ce document a été ouvert à la signature marque un jalon important.» L’homme qui salue ainsi cet événement est le vice-ministre britannique aux Affaires parlementaires, Alistair Burt. Son pays, la Grande-Bretagne, et la France, elle aussi signataire du Traité, ont tout fait pour que l’Union européenne lève l’embargo sur la livraison d’armes, non pas à un Etat, mais à des groupes qui signent leurs actions terroristes en Syrie, et, même indirectement mais inévitablement, à un groupe, le Front Al-Nusra, lié à Al-Qaïda, et reconnu par tous comme terroriste. «A peine le traité a-t-il été signé que l’engagement des puissances mondiales exportatrices d’armes en faveur du TCA est déjà mis en doute par l'aggravation de la situation en Syrie», a souligné Brian Wood, responsable du programme Contrôle des armes et droits humains à Amnesty International. «Les déclarations de soutien au TCA sonneront faux si les décisions d’envoyer des armes en Syrie et ailleurs ne sont pas conformes aux principes du traité. C’est là un test fondamental qui permettra aux gouvernements de faire la preuve de leur détermination à appliquer un traité accordant la priorité aux êtres humains et à leur sécurité.» Amnesty estime que le risque que les armes fournies aux groupes syriens d’opposition soient utilisées pour commettre ou faciliter de nouvelles atteintes aux droits humains est élevé. Tant que ce risque important subsiste, il convient de ne livrer aucune arme. Tous les types d'armements conventionnels sont visés par le texte, dont les chars et les véhicules blindés, les systèmes d'artillerie de gros calibre, les avions et les hélicoptères de combat, les bâtiments de guerre, les missiles et leurs rampes de lancement, les armes à feu et les armes légères. L’appel d’Amnesty sera-t-il entendu ? Rien n’est moins sûr quand on sait que l'armée américaine a annoncé lundi qu'elle enverrait des chasseurs F-16 et une batterie antimissile en Jordanie, une façon bien américaine de jeter de l’huile sur le feu déjà attisé par la décision de l’UE de livrer des armes aux groupes terroristes qui agissent en Syrie.
Kamel Moulfi
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