Lagarde brosse un tableau noir des pays du «printemps arabe»
Christine Lagarde est inquiète. La directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) craint le pire pour les pays touchés par ce que l’on appelle le «printemps arabe». Ces pays (Tunisie, Egypte, Libye, Yémen…) plongent dans des difficultés inextricables dues à leur forte instabilité politique. Dans une tribune publiée sur le Figaro, Christine Lagarde dresse un constat effrayant sur l’état des économies de ces pays qui sollicitent des emprunts auprès du FMI. Lançant un appel «pour un soutien plus résolu et concerté» à ces pays «en transition», la patronne du FMI affirme, ainsi, que «durant ces derniers mois, les turbulences et les tensions économiques se sont accrues dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. «L’aggravation des problèmes sécuritaires, les incertitudes politiques grandissantes et les retards dans la mise en œuvre des grandes réformes nuisent à la confiance économique et brident la reprise», note-t-elle sans grand optimisme. Même la guerre en Syrie lui provoque des sueurs froides. Car au-delà du discours belliqueux de la France et d’autres pays de l’Europe, la déstabilisation de la Syrie impacte le climat politique au Moyen-Orient. «Les effets dévastateurs de la guerre civile en Syrie font craindre une déstabilisation à l’échelle régionale», met-elle en garde en bonne économiste. «Dans la plupart des pays de la région, les chiffres de croissance ne suffisent pas à relever les revenus ni à entamer le problème chronique et grandissant du chômage… Il est affligeant de constater que le nombre des sans-emploi ait augmenté de plus d’un million depuis 2010. Qui plus est, le chômage est au moins deux fois plus grave chez les jeunes : en moyenne, un jeune sur quatre ne trouve pas d’emploi, et dans des pays tels que la Jordanie ou la Tunisie, le taux est proche des 30%», indique Lagarde, pour laquelle si la situation économique ne s’améliore pas, les tensions sociopolitiques risquent de s’aggraver. Autrement dit, ces pays déstabilisés vont plonger dans une crise durable au lieu d’aller vers un «développement durable». Et leur déstabilisation va constituer une menace pour la transition vers une société plus inclusive et retardera davantage le retour de la confiance et de l’investissement privé. «Cette situation difficile appelle une action concertée sur plusieurs fronts», insiste Christine Lagarde. «La Jordanie, le Maroc et la Tunisie, estime-t-elle, ont déjà accompli des progrès encourageants dans ces domaines et le FMI leur apporte son concours.» Mais ils sont toujours dans la zone rouge et risquent de sombrer d’après cette spécialiste à tout moment. Surtout que les indices du timide redressement dans le tourisme ne sont pas stables et solides, et les exportations et l’investissement direct étranger subissent les contrecoups du ralentissement de la croissance qui accentue le chômage et la dégradation de la stabilité macroéconomique. Ce qui conduira à court terme vers l’épuisement des marges de manœuvre budgétaires et des réserves extérieures. Pour elle, il est plus qu’urgent d’engager des efforts supplémentaires pour la croissance et la stabilité des pays arabes en transition afin de faire renaître, au sein de leur population, l’espoir d’un avenir meilleur. Car, pour le moment, la situation de ces populations ne prête pas à l’optimisme.
Sonia B.
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