Maroc : des associations des droits de l’Homme demandent la «réhabilitation» de Zakaria Moumni
Des représentants d’associations des droits de l’Homme ont demandé, aujourd’hui, depuis Paris « réhabilitation » et « réparation du préjudice » causé à l’athlète marocain Zakaria Moumni, libéré le 4 février dernier après 17 mois de détention dans son pays pour « escroquerie ». « Nous ne satisfaisons pas de la simple mise en liberté de Zakaria Moumni Sa détention et son procès constituent une injustice flagrante qui doit être réparée », a déclaré Me Patrick Baudouin, président d’honneur de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH), lors d’une conférence de presse animée en présence de l’athlète marocain et de son épouse. Tout en se félicitant de cette libération intervenue « beaucoup trop tard à notre gré », l’avocat français a estimé que cette « injustice doit être réparée ». « Quand l’honneur de quelqu’un a été terni, quand sa liberté a été bafouée et quand, au surplus, il a subi des humiliations, des tortures et de la détention dans des conditions difficiles, cela signifie qu’il doit être réhabilité », a-t-il affirmé. Ayad Ahram, du comité de soutien à Zakaria Moumni, a affirmé que le champion du monde marocain de boxe light-contact «n’avait rien à faire dans les prisons de son pays, du fait qu’il a été mis arbitrairement au secret et jugé dans un procès monté de toutes pièces ». « Les autorités marocaines ont agi de façon abjecte avec Zakaria Moumni qu’on considérait comme un citoyen qui devait s’agenouiller pour demander des droits et le fait que Zakaria l’ait fait autrement, dignement, n’a pas été du gout de ses détracteurs », a déclaré le secrétaire général de l’Association de défenses des droits de l’homme au Maroc (Asdhom). Tout en exprimant sa « joie » de se retrouver aux côtés de Zakaria enfin libre, il a estimé que le combat pour sa libération a épuisé sa première étape et que, dans une seconde étape, il faudrait lutter pour sa « réhabilitation ». « Son dossier a été sali. Il faudrait que son casier judiciaire soit complètement assaini pour qu’il puisse reprendre une vie normale », a-t-il dit. D’une voie étouffée, Zakaria Moumni a relaté les conditions « inhumaines » de sa détention depuis le 27 septembre 2010, jour de son interpellation à sa descente d’avion à Rabat en provenance de France, jusqu’à son incarcération à la prison de Salé Zaki, à Roumani et à Tamara. « J’ai subi, en plus des insultes et des humiliations, la torture. Fixé à une chaise des heures durant, des personnes que je ne pouvais voir car ayant les yeux bandés m’ont électrocuté tout le corps, même mes parties intimes », a-t-il témoigné, disant «ne rien comprendre» au sort qu’il a subi alors qu’il ne demandait qu’un droit reconnu par un Dahir signé il y a des années par le Roi Hassan II, reconnaissant le poste de conseiller en sport à tout athlète marocain champion du monde. « Je me demande pourquoi j’ai été torturé pour un fait (escroquerie) non avéré. De cette conférence de presse je demande audience au roi Mohamed VI pour lui raconter tout ce que j’ai dû subir pour avoir réclamé un droit, sans plus », a-t-il ajouté. Arrêté pour «escroquerie», Zakaria Moumni a toujours clamé son innocence et affirmé avoir signé sous la torture les aveux selon lesquels il aurait soutiré de l’argent à deux Marocains en leur faisant miroiter un contrat de travail en Europe. Pour Me Baudouin, « il y a aujourd’hui au Maroc toute une série de violations des droits de l’Homme subsistantes à commencer par la question du Sahara Occidental (où j’étais en mission il y a quelques mois), les conditions d’incarcération D’islamistes, des syndicats de journalistes et, périodiquement, des cas de répression, voire de torture dans les prisons ou les commissariats». « Il y a un décalage entre le discours et la réalité au Maroc. Le discours du Roi de volonté de respecter la démocratie, les droits de l’Homme et une magistrature qui deviendrait indépendante ne concorde pas complètement avec ce qui se passe dans la réalité », a-t-il déploré, se demandant est-ce que cela « ne serait pas un trompe-l’œil ou d’une façade derrière laquelle subsisteraient les errements du passé et la résurgence du maintien de pratiques absolument condamnables ».