Le FIS est le fils du système
L’Algérie a tenté de s’inscrire en marge des politiques des deux blocs, ceux de l’Est et de l’Ouest. Lors de la guerre de Libération nationale, elle émargeait avec les Non-alignés, après l’indépendance, elle nationalisait les terres, les banques, les assurances, les mines…les hydrocarbures pour pouvoir pratiquer l’enseignement et les soins gratuits, le droit au travail et au logement pour tous les citoyens comme le lui avaient dicté les Novembristes. L’opposition contestait en invoquant de vraies raisons qui étaient la mauvaise gestion, le manque de liberté, et leurs alliés islamistes répétaient, incantation de leur leitmotiv, cedit religieux : «Nous vous avons créé de différentes couches», pour signifier que si le riche est riche et si le pauvre est pauvre, c’est Dieu qui l’a voulu et on ne doit pas le contredire en travaillant pour les égalités qui consistent à ouvrir des écoles, les hôpitaux pour tous sans distinction. Le socialisme est égalitaire et les islamistes décrètent qu’il est donc illicite.
Le système politique algérien, pouvoir et opposition, se caractérise aujourd’hui par le rejet, la mise à l'écart des anticapitalistes, ces socialistes. Il ne faut nullement s’étonner de voir certains responsables du FIS dans les deux camps, opposition et pouvoir. Un des membres fondateurs du FIS, parti interdit par Boudiaf, ancien coordinateur des Novembristes en 1992, a été reçu ce jeudi 12 juin 2014 par le ministre d’Etat et directeur de cabinet du président de la République. Il est plus facile aujourd’hui de reconnaître les couleurs du libéralisme entamé par Chadli au début des années 80 grâce à la réussite de l’actuel Président qui fait de l’opposition un allié pour officialiser le retour des responsables du drame national, dont la principale revendication, faut-il le rappeler, est l’application de la charia, c'est-à-dire un Etat théocratique. Le RCD et autres partis dits démocratiques qui ont décidé récemment de travailler avec les islamistes pour une transition ont comme objectif l’expansion du capitalisme, naturellement, mais aussi cet anticommunisme, que les intégristes pour leur cause traduisent par athéisme. La transition qu’ils préconisent aujourd’hui n’est pas dans la consolidation des libertés ou une autre émancipation du peuple, mais principalement dans le passage du secteur public au secteur privé, une pratique qui ne peut s’énoncer.
Saadeddine Kouidri