Un théologien de Ghardaïa : «Belkhadem fait montre d’une décadence intellectuelle effroyable»
Réagissant à une intervention de l’ex-secrétaire général du FLN et conseiller du président de la République, Abdelaziz Belkhadem, sur une chaîne de télévision algérienne, où il a abordé les événements de Ghardaïa, l’éminent théologien Cheikh Mohamed-Salah Nacer n’y est pas allé avec le dos de la cuillère pour l’accabler et l’accuser de vouloir jeter de l’huile sur le feu et d’appeler carrément à l’extermination des ibadites. L’éminent cheikh mozabite trouve inacceptable qu’un responsable du rang de Belkhadem puisse se laisser aller à des discours aussi haineux contre une communauté, celle du M’zab, et fasse montre d’une «décadence intellectuelle aussi effroyable». Dans ce message intitulé «Un responsable irresponsable», le théologien écrit : «Au moment où, nous, enfants de la région du M’zab, attendions des solutions urgentes et radicales à ce drame qui n’a que trop duré, ce responsable vient nous proposer, avec culot et sang-froid, des solutions de court, moyen et long termes, qui convergent toutes vers un seul et unique objectif : l’extermination totale des Mozabites de rite ibadite.» Enchaînant dans son réquisitoire, Cheikh Nacer accuse encore : «Alors que les chercheurs du monde entier sont subjugués par admiration pour la civilisation du M’zab, qui s’exprime à travers ses organisations religieuse, sociale et éducative, ce responsable vient nous proposer rien moins que de soumettre ses institutions à l’Etat, comme si celles-ci étaient hors-la-loi, sachant que l’Etat ne s’est jamais intéressé, ni de loin ni de près, à ces institutions. D’ailleurs, où était cet Etat depuis un demi-siècle ?» s’indigne Cheikh Mohamed-Salah Nacer. «Vos propositions pour l’assimilation et la dilution n’ont aucune chance de survivre et ne pourront vivre que dans votre imagination fétide et celle de vos pairs qui ont déjà essayé en 1964 ce plan antinational et raciste, en vain. Interrogez le mouhafedh de la wilaya de Ghardaïa, qui doit conserver encore les archives de cette époque sinistre !» fulmine-t-il. Le théologien conclut son message par un avertissement qui s’adresse à tout le système politique : «Il faut faire attention à ne pas jouer encore une fois avec le feu !» Dans la seconde partie de cette réplique, Mohamed-Salah Nacer rappelle au fils de Tiaret qu’est Belkhadem «le passé glorieux» de la dynastie des Rostomides dont se revendiquent aujourd’hui tous les Mozabites, et le conseille de «s’en inspirer pour comprendre la position actuelle» de cette communauté. Il lui suggère d’admirer «la patience de la population du M’zab après tout ce qu’elle a enduré, au lieu de tenter de ranimer le feu de la haine et d’appeler à excommunier les ibadites». Il lui propose enfin d’œuvrer à la réhabilitation du rite malékite que l’auteur juge «aujourd’hui perverti par une campagne wahhabite dite salafiste qui a envahi les mosquées et manipule les fidèles par des fatwas cultivant la fitna».
R. Mahmoudi