Innovation en Afrique du Nord : le constat sévère de la BAD
Dans sa dernière «Note économique» dédiée à l’Afrique du Nord, la Banque africaine de développement (BAD) analyse ce qui détermine l’innovation et la productivité dans les pays de la région et constate «une sous-utilisation et une allocation inefficiente du capital humain dans ces pays et notamment au Maroc et en Egypte». «Aussi surprenant que cela puisse paraître, peut-on lire dans le résumé de cette publication, en Afrique du Nord, les ressources humaines qualifiées ne semblent pas avoir d’effet sur l’innovation et sur la productivité» Les exportations ne semblent pas non plus produire d’effet d’entraînement sur l’innovation, affirme la BAD qui considère que cela est dû «sans doute au fait de la structure rigide des avantages comparatifs (coût de la main-d’œuvre, position géostratégique, etc.) dans ces pays et de ce que les exportations s’avèrent concentrées dans des secteurs à faible valeur ajoutée et à potentiel technologique réduit – au Maroc en particulier». Dans ce contexte, où ni le capital humain ni l’incitation à monter en gamme pour conquérir de nouveaux marchés ne semblent avoir d’effet vertueux, la BAD recommande de porter une attention particulière à certains aspects du système national d’innovation tels que les acteurs impliqués dans la recherche et le développement (R&D) ; cadres juridique, fiscal et institutionnel ; outils incitatifs… et ce, précisément afin de dynamiser l’innovation et stimuler la productivité en Afrique du Nord. Tout d’abord, il conviendrait, selon la BAD de renforcer la gouvernance au sein des systèmes nationaux d’innovation, tout en dynamisant le monde de la recherche et celui de l’entreprise, dans l’objectif de décloisonner les deux sphères et qu’elles interagissent, de façon plus efficace et fructueuse. Cela implique, en amont, un soutien accru à l’enseignement supérieur et à la formation professionnelle afin d'améliorer les compétences des ressources humaines. «Mieux formées et à plus forte valeur ajoutée, celles-ci contribueront davantage – et mieux – aux processus de production et d’innovation de leurs pays respectifs». Ensuite, il s’agirait de mettre en place des programmes incitatifs plus favorables aux investissements directs étrangers (IDE) innovants et à plus forte valeur ajoutée et que ces programmes soient suffisamment intégrés, tant en amont qu’en aval, à l’économie locale. Par exemple, des mécanismes de contractualisation qui soient soutenus par l’Etat pourraient être instaurés dans les domaines des sciences et des technologies, entre centres de recherches, universités, entreprises locales à potentiel d’innovation et entreprises étrangères souhaitant délocaliser leurs activités de R&D. «Cela permettrait de renforcer la cohésion entre les différentes composantes du système national d’innovation autour de projets novateurs», assure la BAD qui estime en outre que la poursuite «des efforts pour doper l’innovation et la productivité dans la région permettrait de faire monter en gamme les économies respectives des pays concernés et, partant, de créer plus d’emplois et de meilleure qualité ainsi que d’élever le niveau de vie des populations nord-africaines».
Meriem Sassi