Le message de Hollande aux Français : «C’est la dernière fois que la France paye une rançon»
«La France ne compte plus d'otage dans aucun pays du monde et elle ne doit plus en avoir, ce qui suppose une grande vigilance, ce qui suppose également une grande protection de nos intérêts et je fais appel à toutes les entreprises, à toutes les administrations pour qu'il en soit ainsi et éviter ces drames», a déclaré le président François Hollande. En indiquant que Serge Lazarevic devra être le dernier Français à être pris en otage, le président français signifie-t-il que ce sera la dernière fois que la France paierait une rançon pour la libération d’un ressortissant français pris en otage par les groupes terroristes ? Difficile de parier tant la France fait partie des pays qui paient le plus de rançons pour obtenir la libération de leurs ressortissants. Contrairement aux démentis permanents des responsables français, Paris a payé, selon une enquête du New York Times, près de 60 millions de dollars de rançons à l'organisation terroriste Al-Qaïda et à ses groupes affiliés, qui disposent désormais d'un mode opératoire bien huilé. Mais la France, qui coopère dans la lutte antiterroriste avec d’autres pays comme l’Algérie, est appelée à respecter ses engagements officiels de non-paiement de rançons. Souvent, les autorités françaises ne donnent aucune explication sur la manière par laquelle elles ont obtenu la libération de leurs otages. C’est valable pour Serge Lazarevic. Le Figaro a d’ailleurs mis en avant le fait que «comme toujours, les conditions de cette libération restent floues», précisant que Paris se contente d'affirmer qu'elle est le fruit «d'efforts intenses» et de remercier les autorités maliennes et nigériennes. Une timide réaction qui confirme que la libération Serge Lazarevic a été faite après paiement d’une rançon. Une libération qui intervient quelques jours après la signature de la déclaration du Comité intergouvernemental algéro-français. Cela prouve le double langage de la France s’agissant de la lutte antiterroriste et de la passivité de l’Algérie par rapport à cette question, puisqu’elle sait que la France paye les rançons et ne réagit pas. Une passivité qui n’a pas lieu d’être d'autant plus que la coopération militaire dans la lutte contre le terrorisme s’intensifie entre les deux pays. D’ailleurs, comme l’avait annoncé le Nouvel Observateur, l’Algérie s’apprête à servir de «relais logistique militaire» pour l’armée française présente au Sahel. Pour faire sortir la France de ce «bourbier», le président Hollande demande aux Français de prendre leurs responsabilités à l’avenir et de ne plus se risquer dans des pays connus pour être dangereux sur le plan sécuritaire. Autrement dit, il leur demande ainsi de ne pas mettre l’Etat français dans l’embarras vis-à-vis des autres pays foncièrement opposés au versement de rançons aux terroristes. Surtout que maintenant les Français sont les seuls ressortissants que les groupes terroristes enlèvent dans le Sahel. Car, selon toute vraisemblance, ce sont les seuls qui ont une valeur marchande, puisque la France est aussi le seul pays qui paye encore. Le paiement de rançons suscite la polémique même au sein de la classe politique française. La présidente du Front national, Marine Le Pen, est opposée à ce qu’elle qualifie «une stratégie ancienne, qui ne date pas de François Hollande consistant à verser des rançons aux preneurs d'otages». «En payant régulièrement des rançons, on fait monter le prix des otages», estime-t-elle, appelant à suivre les méthodes à l'américaine, à l’algérienne ou à la russe, des pays qui refusent de négocier des rançons. Car elles sont les meilleures en ce sens qu’elles permettent de limiter l'attractivité de ces prises d'otages. Il est clair que si la France veut concrètement lutter contre le terrorisme, elle doit impérativement cesser de verser les rançons pour la libération de ses otages.
Rafik Meddour