Deux tiers des Québécois s’opposent à la présence d’une mosquée dans leur quartier
C'est ce que révèle un sondage publié cette semaine par le journal canadien d'expression française La Presse. L'enquête a été menée suite à une demande introduite par des habitants musulmans d'un immeuble à Shawinigan pour aménager une mosquée, vite rejetée par les élus municipaux de cette ville, refusant d'accorder les modifications nécessaires à ce qu'ils appellent le «règlement de zonage». Le prétexte avancé, officiellement, est que la proximité de l'endroit avec une zone semi-industrielle ne permettrait pas l'installation d'une mosquée ou de tout autre lieu de culte. Selon ce sondage, 65% des personnes interrogées sont favorables à la décision de la ville, contre 24% seulement qui la désapprouvent. Plus globalement, les Québécois sont presque tout aussi nombreux à refuser la présence d'une mosquée dans leur quartier. Ils sont exactement, d'après les enquêteurs, 64% à exprimer leur «désaccord» avec cette proposition. Si l'enquête ne précise pas les motifs pour lesquels les personnes sondées ne voudraient pas d'une mosquée près de chez eux – ce qui aurait certainement éclairé davantage –, cette attitude ne participe pas moins de l'islamophobie ambiante, nourrie par des discours politiques et médiatiques faisant sciemment l'amalgame entre l'extrémisme islamiste, incarné par des groupes marginaux qui prônent la violence, et des pratiques religieuses qui relèvent d'un culte pourtant bien établi au Canada. Il y a une crainte que cette tendance, tout à fait inédite au Québec où vit une importante communauté musulmane, dont environ 50 000 Algériens, puisse profiter aux courants politiques xénophobes dits «souverainistes» qui, généralement, font de la lutte contre l'immigration leur cheval de bataille. Face à la montée de la haine et à la multiplication des actes antimusulmans, des citoyens issus de la communauté musulmane ont créé le Collectif québécois contre l'islamophobie (CQCI). Dans un communiqué rendu public vendredi dernier, ce collectif dénonce «le lynchage médiatique» auquel est soumis son coordinateur, Adil Charkaoui, et lance un appel à tous les citoyens «épris de justice» afin de formuler des plaintes au Conseil de presse du Québec et au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, afin d'appuyer les poursuites envisagées par le dirigeant du CQCI en diffamation et en atteinte à sa réputation. Le collectif accuse des «militants identitaires», des sionistes et des extrémistes de droite de mener une campagne acharnée contre son représentant, en envoyant quotidiennement des insultes, des propos haineux et même des menaces de mort.
R. Mahmoudi