Chute vertigineuse des recettes publicitaires : des dizaines de journaux au bord de la faillite
Conséquence directe de la stagnation des projets d’investissement dans le pays, l'écrasante majorité des titres de la presse nationale sont au bord de l’asphyxie financière à cause de la baisse des recettes engrangées par la publicité fournie par les différents opérateurs économiques nationaux et étrangers, sous forme de campagnes promotionnelles ou d’appels d’offres. Cela apparaît clairement à travers le rétrécissement accru des espaces publicitaires dans ces journaux qui, il y a quelques mois, occupaient jusqu’à 12 pages pour un tabloïd qui en compte 24. Pour la quasi-totalité de ces journaux qui vivent exclusivement des recettes publicitaires, la situation risque de les pousser, bientôt, à déposer le bilan, faute de plan de redressement viable. Car les ventes ne suffisent plus à couvrir les charges importantes (masse salariale, coûts d’impression et de distribution, etc.) qui pèsent sur ces entreprises, dont la majorité est maintenue en vie grâce à la publicité institutionnelle fournie par l’Etat, officiellement en guise d’aide à la presse, mais qui sert réellement de moyen de contrôle et de pression pour imprimer à ces vecteurs médiatiques une ligne politique bien définie, qui est celle du pouvoir en place. Ce qui a fait, d’ailleurs, de l’Anep, l’Agence nationale d’édition et de publicité, une source de gabegie et d’enrichissement illicite pour un certain nombre de propriétaires de journaux. Les scandales révélés au grand jour par Algeriepatriotique illustrent l’état de dévoiement dans lequel se trouve cette institution publique à la tête de laquelle vient d’être désigné notre confrère Djamel Kaouane en remplacement d’Ahmed Boucenna. Il n’y a pas, à vrai dire, que ces petits titres parasitaires créés après 1999, et mus par le seul objectif de capter la publicité de l'Anep, qui sont responsables de cette situation. Il faut dire que, pendant des années, la plupart des éditeurs de presse ont profité de la manne publicitaire, publique ou privée. Sauf que cette embellie financière ne s’est pas répercutée positivement sur l’essor des entreprises, dans le sens où celles-ci n’ont pas amélioré la qualité de leur produit ni garanti de meilleures conditions socioprofessionnelles pour leurs employés, sous-payés et souvent non couverts socialement. Où sont partis, alors, tous les milliards gagnés par ces titres ? Seule une enquête sérieuse sur les placements effectués par les patrons véreux et l’affectation des recettes, mirobolantes pour certains organes bien lotis, peut le révéler. Après avoir longtemps rechigné à prendre la publicité institutionnelle, sous prétexte que celle-ci est utilisée pour «soudoyer» les journaux opposants, certains «grands titres» la réclament aujourd’hui à tue-tête, parce que pâtissant d’énormes déficits en matière de publicité, après avoir longtemps profité des annonces privées, servies abondamment par certains constructeurs automobiles et un opérateur de téléphonie mobile aujourd’hui racheté par l’Etat, au point de ne plus pouvoir s'acquitter, comme c'est le cas de certaines entreprises jusque-là florissantes, de leurs obligations fiscales. De nombreux journaux risquent de mettre la clé sous le paillasson dans les mois à venir et des actionnaires dans certaines entreprises de presse, proposeraient leurs actions à la vente, avant que le bateau ne coule. Mais qui est prêt à acheter une dette pourrie dans un contexte de marasme économique profond ?
R. Mahmoudi