Parution irrégulière et pagination réduite : sale temps pour la presse nationale
Plusieurs titres de la presse écrite, au tirage moyen, sont sur le point de mettre la clé sous le paillasson. Quelques-uns, à faible tirage, ont déjà cessé de paraître depuis des semaines. D’autres réduisent leur pagination pour tenter de faire baisser le coût de l’impression, devenu difficilement supportable en ces temps de crise économique profonde qui déteint sur le marché de la publicité. La presse écrite, en général, traverse des moments difficiles en raison de la baisse vertigineuse de la publicité étatique et la rareté de la publicité des entreprises privées. De nombreux quotidiens nationaux, vivant depuis de longues années de la publicité étatique, voient en effet les espaces publicitaires se rétrécir de jour en jour, mettant en péril leur équilibre financier. Dépendant de cette publicité, plusieurs titres, dont le tirage et les ventes restent faibles, recourent donc à la limitation des charges, allant jusqu’à faire baisser leur nombre de pages de 24 à 16. Certains ne paraissent que quand ils ont de la publicité pour réduire les charges liées à l’impression. Il faut dire que la mise en application du plan d’austérité du gouvernement s’est traduite tout naturellement par la baisse de la publicité étatique. Ainsi, les commandes de publicité publique qui passent par l’Anep ont substantiellement diminué. Et les plus faibles tirages restent les plus touchés et les plus vulnérables, cela même si cette crise n’épargne aucun titre de la presse nationale. Des dizaines de quotidiens risquent de déposer le bilan si la conjoncture perdure. Et on peut classer la presse nationale en trois catégories. La première est constituée de quelques journaux qui ont déjà cessé de paraître. La deuxième est celle des titres qui bataillent comme ils peuvent pour maintenir leur existence sur le marché, même avec des pages en moins. Et la troisième catégorie est celle des grands titres qui cherchent à booster leur vente pour amortir les pertes dues à la baisse de la publicité. Surtout que les imprimeries étatiques exigent désormais des titres d’honorer leurs engagements commerciaux. Au début du mois courant, nous avions rapporté que les imprimeries étatiques avaient adressé des mises en demeure à plusieurs journaux, les invitant à fournir des explications quant à l’absence de régularité de leurs commandes d’impression. Les journaux qui n’ont pas honoré leurs dettes ont également été mis en demeure d’y remédier dans les plus brefs délais. Ainsi, aujourd’hui, nous avons appris que la SIA a réduit de trois quarts le tirage d’un «grand» journal arabophone qui n’a pas daigné régler une partie de ses factures impayées. Et il n’y a pas qu’un journal dans cette situation. Plusieurs titres, mauvais payeurs, bien qu’au tirage très modeste, ont été irrigués pendant de longues années de la publicité étatique qu’ils n’ont utilisée ni pour développer leur entreprise ni pour honorer les factures de l’imprimerie. Ces titres ont cumulé des dettes astronomiques chez les différentes imprimeries de l’Etat qu’ils ne comptent assurément pas régler. Leur avenir, comme celui de plusieurs titres nationaux qui paient, est incertain. Et le paysage médiatique en pleine mutation, avec l’avènement d’autres supports médiatiques, risque de connaître une reconfiguration profonde. Au profit de qui ? L’avenir nous le dira.
Rafik Meddour