Nos dirigeants sportifs cultivent le mépris
Par Saadeddine Kouidri – Quand Ahmed Mahour-Bacha, lors de sa dernière conférence, affirme que «Berraf et Brahmia ne cessent d’invectiver et d’insulter les gens, alors qu’ils dirigent l’instance morale qu’est le COA», cela fait tilt avec cette autre information donnée le 24 septembre 2015 dans le Réseau des démocrates de Mohamed Baghdadi, qui rapportait qu’«un fait insolite s’est produit lors du vol spécial de la compagnie nationale qui ramenait la délégation algérienne qui a pris part aux Jeux africains de Brazzaville, au Congo. Alors que le champion olympique Taoufik Makhloufi prenait place en première classe, le chargé de la préparation olympique au COA, Amar Brahmia, est intervenu pour l’inviter à retourner en classe économique».
Ce «fait insolite» est une remarque désobligeante qui, faite en publique, peut prendre des proportions incommensurables. De surcroît quand on est jeune et Makhloufi n’avait que 27 ans. Il est médaillé d’or olympique, venait d’échouer aux Jeux africains et avait, dans ce cas, plus besoin de réconfort que de remontrance de la part de son aîné qui, en sus, n’avait aucune qualité à ce sujet. Dans un avion, seul le chef de cabine et ses stewards sont responsables du placement des voyageurs.
Après un tel incident, M. Berraf ne devait pas maintenir M. Brahmia comme chargé de la préparation olympique s’il avait voulu que Makhloufi aille chercher l’or à Rio. Car l’or est incompatible avec le ressentiment et, apparemment, c’est ce qui a nourri le jeune champion pendant presque une année et, de ce fait, l’a handicapé. Il a attendu le moment d’être certain de se faire entendre pour dénoncer les responsables de l’échec de Rio mais, surtout, pour vider son sac, sans pour autant aller à l’essentiel qui est de parler de son humiliation. Ce n’est pas de la nature d’un jeune d’affirmer publiquement qu’il a été humilié. De plus, il ne pouvait et il ne peut le faire car il sait que les dirigeants sportifs cultivent le mépris au quotidien et a peur, dans le même temps, que le peuple ne puisse comprendre qu’il ait pu garder cette blessure aussi longtemps. Cette blessure n’est-elle pas enjolivée dans ce qu’il qualifie de «sabotage» quand, à la fin de course du 1 500m, il déclare que «nous avons réalisé un exploit malgré le sabotage de certains responsables» ?
Des dirigeants sportifs des plus hautes instances cultivent le mépris au point où ils sont satisfaits des résultats, lors d’une rencontre internationale, juste pour le comportement normal des jeunes. Ils vont jusqu’à nier l’échec et semblent même en être satisfaits. Si le sport se conjugue avec l’amour, l’anti-sport se conjugue, lui, avec la haine. Le COA a alourdi Makhloufi d’un brin de haine qui l’a empêché d’accédé à l’or cette année, et conserver son titre olympique acquis en 2012 à Londres.
On voit que ce n’est pas seulement l’affaire du ministère de la Jeunesse, n’est-ce pas, mais aussi celle du COA nommée «institution morale», l’essence de sa vocation, et de tous, à commencer aussi par le chef de cabine d’Air Algérie dans ce cas.
S. K.
Comment (6)