Quand le chroniqueur français Eric Zemmour joue avec le feu de la xénophobie
La France est à nouveau…«occupée». C’est Eric Zemmour qui le révèle, cité par un site pro-sioniste, mais il promet que la «reconquête des territoires perdus» est pour bientôt grâce à l’aide décisive de l’armée israélienne qui s’est préparée à mener sur le sol français l’opération Ronces, dont «le plan, précise-t-il, est déjà dans les cartons». Il l’affirme dans son dernier livre Un quinquennat pour rien. Eric Zemmour, qui n’est pas humoriste, mais chroniqueur-polémiste sur la chaîne RTL, prétend qu’il tient l’information de quelqu’un de «très proche de l’état-major (français)».
L’allusion évidente porte sur les cités des banlieues marquées par une forte présence de la communauté musulmane, principalement maghrébine, en France. Il évoque, très sérieusement, semble-t-il, Gaza et la Bataille d’Alger, pour parler de ce qui va se produire en France en soulignant que «la comparaison vaut tous les discours». La «sortie», pourtant originale et sensationnelle, de Zemmour n’a pas retenu l’attention des premiers commentateurs qui ont lu son ouvrage. Soit elle est passée inaperçue, soit elle n’a pas été prise au sérieux. L’intérêt pour Un quinquennat pour rien, censé être un recueil de ses chroniques matinales sur RTL, s’est focalisé non pas sur les «territoires perdus de la France», mais sur deux de ses chroniques «perdues», dont celle intitulée «Bombarder Molenbeek» la célèbre banlieue islamiste bruxelloise, qui ne figurent pas dans le livre.
Eric Zemmour qui est au courant des choses les plus secrètes, même si elles paraissent incroyables, comme l’opération Ronces, ne sait pas qui est derrière la «perte» de sa chronique sur Molenbeek. Il devrait exercer sa perspicacité dans la résolution de ce que lui-même a qualifié de «mystère» : comment deux de ses chroniques les plus sulfureuses ont pu disparaître de la clé USB remise à l’éditeur ? Dans sa recherche de la facilité, il a choisi de cibler une religion et ses millions d’adeptes en France, en grossissant les traits négatifs des cités jetées par l’Etat français dans les bras des islamistes pour en faire une masse de manœuvre et de manipulation mobilisable pour des objectifs inavoués et qui se sont traduits, au grand jour, par l’envoi de «djihadistes» en Syrie chargés de chasser Bachar Al-Assad du pouvoir.
Certains de ces fanatisés sont revenus en France, d’autres ne l’ont pas quittée, et cela a donné les attaques terroristes contre la rédaction du Charlie Hebdo, en janvier 2015, puis Paris, en novembre de la même année, et ensuite sur la Promenade des Anglais à Nice, le 14 juillet dernier. Un contexte parfait pour Eric Zemmour qui a pris le parti de la stigmatisation des banlieues qui sont, il est vrai, parfois, des zones de non-droit, et de ceux qui les habitent, qui seraient des Français à part, pas comme les autres, et susceptibles d’être déchus de leur nationalité et expulsés au moindre soupçon ou à la plus petite alerte.
Mais en laissant entendre que, vrai ou faux, les «spécialistes» de l’armée israélienne agissent clandestinement en France et se préparent même à opérer ouvertement dans les cités des banlieues, contre, faut-il le rappeler, des Français, donc dans une guerre civile, Zemmour ne craint pas de jouer avec le feu en réveillant plutôt le vieux démon du sentiment antisémite latent dans la société française et qui a souvent fait mal à la communauté israélite dans ce pays. Pourtant, il doit parfaitement savoir dans quel sens le réflexe xénophobe chez certains Français «de souche» va agir de façon significative, s’il est provoqué à outrance comme il persiste à le faire ; leur première frappe ne visera certainement pas les musulmans.
Houari Achouri
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