Le secrétaire général du RND sévit contre ses opposants : Ouyahia est-il démocrate ?
La réaction intransigeante d’Ahmed Ouyahia à l’égard d’un certain nombre de militants du Rassemblement national démocratique (RND) révèle un profond malaise au sein de cette formation politique au pouvoir depuis sa création en février 1997. Des cadres du parti ont été traduits devant le conseil de discipline pour avoir rendu public un communiqué dans lequel ils ont dénoncé les dérives constatées au RND et critiqué la déclaration d’Ahmed Ouyahia au sujet des crânes des résistants algériens détenus en France, ce dernier ayant appelé à leur maintien au Musée de l’Homme de Paris au lieu de leur rapatriement, comme revendiqué officiellement à travers, notamment, le ministère des Moudjahidine. Les frondeurs ont saisi l’occasion des turbulences qui ont secoué le FLN, parti allié, pour tenter de faire subir au secrétaire général du RND le même sort qu’Amar Saïdani, destitué par le président Bouteflika pour ses dérapages verbaux récidivants, dont le dernier lui a été fatal.
Ce n’est pas la première fois que des opposants à Ahmed Ouyahia chargent le premier responsable du parti, qui est revenu aux commandes après avoir été forcé à la démission. Dans leur communiqué, les frondeurs avaient veillé à réitérer leur soutien au programme du président Bouteflika afin de lever toute équivoque sur leur mouvement de contestation qui «se limite» au seul secrétaire général du parti et néanmoins directeur de cabinet de la présidence de la République. Mais l’attitude lénifiante d’Ouyahia, qui évite toute polémique dans ses interventions publiques, le prémunit contre le risque de se faire remonter les bretelles par le chef de l’Etat à qui il voue fidélité et obéissance, mais avec un zèle contrôlé.
La guerre entre le secrétaire général du RND et un groupe de dissidents remonte à 2012. Le mouvement de contestation avait été déclenché après les dernières législatives qui avaient vu plusieurs figures du parti écartées des listes électorales. Les prochaines échéances étant proches, les frondeurs du RND semblent manœuvrer pour se placer lors de ce rendez-vous décisif qui précède la présidentielle de 2019. Régnant d’une main de fer sur le parti depuis son retour, Ahmed Ouyahia minimise l’impact de l’action de ses détracteurs qu’il qualifie de «groupuscule» et auxquels il dénie le droit de «dicter leur loi».
Les opposants à Ouyahia, dont le mouvement est conduit par l’ancien président de l’APC d’Alger, Tayeb Zitouni, et la secrétaire générale de l’Union nationale des femmes algériennes, Nouria Hafsi – appuyés, dit-on, par deux ténors du parti, Cherif Rahmani et Saïd Abadou –, affirment «rejeter l’injustice, la marginalisation et l’exclusion». Après avoir échoué à faire reporter la tenue du congrès extraordinaire qui devait confirmer le secrétaire général par intérim dans son poste, les frondeurs, qui se disent «déterminés à aller jusqu’au bout de leur démarche», semblent isolés, mais leur action a le mérite de montrer le vrai visage du «démocrate» Ouyahia, un chef de parti à l’autorité inflexible sous une apparence exorable.
Karim Bouali
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