Appel au soutien à des militants arrêtés pour avoir dénoncé l’esclavage en Mauritanie
Des militants mauritaniens qui luttent pour mettre fin à l’esclavagisme dans leur pays sont réprimés pour avoir dénoncé cette pratique d’un autre âge. IRA-Mauritanie (Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste en Mauritanie) a fait parvenir à Algeriepatriotique le texte d’un appel «à la mobilisation générale à l’intérieur comme à l’extérieur du pays, à l’occasion de l’ouverture du faux ‘‘procès en appel’’, ce 14 novembre 2016, des 13 otages abolitionnistes du pouvoir du général Ould Abdel Aziz, qui sont membres de IRA-Mauritanie». Ces militants sont condamnés, depuis le 18 août 2016, à des peines allant de 3 à 15 ans de prison ferme à cause de leur participation à une manifestation le 29 juin dernier, pour s’opposer à un déplacement forcé d’habitants d’un bidonville de Nouakchott. Ils ont été condamnés, précise l’ONG, «en l’absence du collectif constitué pour leur défense, qui avait décidé de se retirer du procès pour protester contre les tortures infligées, les violations de procédures».
Impensable en 2016 et, de surcroît, en terre d’islam, puisqu’il s’agit de la «République islamique» de Mauritanie : quelque 20% de la population, soit à peu près 600 000 Mauritaniens, sont des esclaves, «par ascendance», et sont la propriété de personnes, en principe leurs concitoyens, qui peuvent les vendre et en acheter d’autres. Selon les spécialistes de cette question, des esclaves mauritaniens sont «exportés» vers les pays du Golfe. Pourtant, l’esclavage n’est pas légal en Mauritanie; au contraire, il a été aboli officiellement en 1981, puis inscrit dans la Constitution comme un crime, mais les criminels esclavagistes agissent impunément et bénéficient de la complaisance, voire de la protection des autorités qui s’en prennent plutôt aux militants des droits de l’Homme mauritaniens antiesclavagistes qui agissent sur le terrain pour libérer les victimes de la traite, en particulier les femmes et les enfants, qui n’ont aucun droit.
La loi qui assimile l’esclavage à un crime contre l’humanité, votée par le Parlement mauritanien en 2015, a durci les peines prévues contre cette pratique, mais elle n’est pas appliquée avec la rigueur voulue, alors que le pouvoir avait adopté un an auparavant une «feuille de route» élaborée avec l’ONU pour son éradication. Pour IRA-Mauritanie, la répression contre ses membres vise à «entraver le travail des militants des droits humains sur le terrain, faire taire les abolitionnistes en protégeant les criminels esclavagistes». L’organisation antiesclavagiste dénonce les «faux généraux mauritaniens qui tirent les ficelles en abusant de leur pouvoir et qui ne sont pas encore entrés dans l’ère du XXIe siècle. Ils sont et restent bloqués dans l’ère du Moyen-Age, croyant que livrer les richesses du pays au pillage des entreprises multinationales des pays industrialisés leur permet d’avoir le droit de vie et de mort atroce gratuite sur des paisibles citoyens qui réclament leur droit le plus naturel au monde». IRA-Mauritanie exige «la libération sans condition des militants abolitionnistes et membres de l’ONG» et «la réparation du préjudice injustement subi, avec des dommages et intérêts».
Dans son appel, IRA-Mauritanie fait savoir que ces militants ont été «jetés en prison à 1 200 km de leurs familles, sans raison, sur des accusations fallacieuses montées de toutes pièces par des fonctionnaires pervers, menteurs et tricheurs». En fait, leur «crime» est de lutter avec obstination et courage dans une ambiance d’indifférence imposée par la loi du silence et par les «justificatifs» invoqués par des hommes de religion sur lesquels s’appuient hypocritement le régime en place à Nouakchott pour fermer les yeux sur la pratique de l’esclavage, avec la complicité de tout le système politique et judiciaire.
Houari Achouri
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