Affaissement de la route à Ben Aknoun : entre critique excessive et démagogie
L’affaissement qui s’est produit sur la rocade sud reliant Zéralda à Dar El-Beïda a suscité de nombreux commentaires, notamment sur les réseaux sociaux qui se sont vite enflammés dès la diffusion des premières images. Si certains internautes se sont montré plutôt mesurés et prudents dans leurs propos en tenant compte, surtout, du facteur naturel immaîtrisable partout dans le monde, d’autres se sont livrés à des critiques excessives, loin de toute perspicacité scientifique. Certes, il est tout à fait logique de demander une enquête sérieuse pour déterminer les causes de cette catastrophe. Mais faire le reproche aux autorités d’avoir laissé se produire une catastrophe naturelle, c’est prendre le risque de banaliser la critique. Car des phénomènes naturels tels que l’affaissement de terrains restent imprévisibles, comme d’ailleurs les séismes.
La preuve est que de tels affaissements ont affecté des pays habitués aux catastrophes naturelles comme le Japon. Dans ce pays, qui est l’une des plus grandes puissances économiques du monde, il y a eu, la semaine dernière, un cratère suite à un affaissement en plein cœur de l’une de ses grandes villes (https://www.youtube.com/watch?v=iMLWjGv-Mx0). Un affaissement provoqué par l’explosion d’une grosse conduite d’eau. Au Canada aussi, plus exactement au centre d’Ottawa, un immense trou s’est produit en juillet dernier, provoquant la fermeture pendant plusieurs jours d’un axe routier important de cette ville.
A cet excès de critiques s’ajoute le zèle de certains responsables qui s’aventurent à faire des déclarations et à prendre des engagements, sans consulter les techniciens du domaine. C’est le cas du wali d’Alger qui s’est engagé avant même que les victimes ne soient totalement secourues à «boucher» ce trou béant avant «samedi à 20h». Un délai qui risque de s’avérer plus que contraignant pour les techniciens en charge de conduire les travaux de réparation. Comment le wali a-t-il pu faire une telle annonce alors que les équipes techniques n’étaient pas encore sur place et n’avaient pas encore «ausculté» ce cratère pour pouvoir déterminer la nature des travaux à effectuer et, par conséquent, en fixer la durée ?
Il est clair que l’annonce du wali d’Alger vise à contenter la population en limitant au minimum la durée des désagréments. Mais satisfaire la population risque d’être très coûteux sur le plan de la sécurité routière. Car faire vite, c’est prendre un grand risque de bâclage des travaux avec toutes les conséquences qui en découleront. Le wali pourrait demain se féliciter d’avoir «fait» plus vite que les Japonais mais sans avoir la certitude d’avoir pris toutes les précautions nécessaires pour que cet affaissement ne se reproduise plus.
Les autorités japonaises, avec tout le sérieux, les moyens technologiques et l’expérience de leurs entreprises, n’ont pas osé fixer de délai aux travaux de réparation, laissant le soin aux techniciens de le faire une fois les études terminées. Et les travaux de réparation ont duré le temps nécessaire, à savoir une semaine (https://www.youtube.com/watch?v=W3A-kA3sEeA), ce qui est déjà considéré comme un «record» dans ce genre de situation. Les Japonais ont démontré que le plus important était de faire bien et vite quand cela est possible. Il y va de la sécurité du citoyen et de la crédibilité de l’Etat.
Sonia Baker
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