Quand la guerre en Syrie et en Libye inspire les fêtards du Mouloud en Algérie
Des vidéos postées sur les réseaux sociaux montrent des scènes de jeux de guerre entre habitants d’immeubles d’un même quartier à l’aide de produits pyrotechniques très dangereux. Il est évident que ces «guerres» sont directement inspirées de ce qui se passe en Syrie et en Libye. Cela amène à se demander si les armes blanches – couteaux, épées… – utilisées dans les violences interquartiers entre bandes rivales ou familles en conflit ne seront pas remplacées par les produits pyrotechniques (fusées, fumigènes, «bombes»…) ?
Les produits pyrotechniques ont l’«avantage» de donner à la violence urbaine un cachet plus «contemporain», plus «moderne» que les haches et les sabres qui imposent des combats rapprochés et rappellent les temps anciens. Mais, surtout, les produits pyrotechniques permettent de «copier» les vraies guerres qui se déroulent en Syrie et en Libye et dont les images inondent les écrans de certaines chaînes de télévision étrangères très regardées par les Algériens. Les noms que donnent les vendeurs à ces produits de contrebande prohibés en Algérie sont déjà suggestifs – double bombe, Daech… – et les formes des pétards qui les font ressembler à des munitions également.
Cette parodie de la guerre «urbaine» telle qu’elle a cours en Syrie et en Libye a déjà inspiré les supporters, ou plutôt les délinquants qui occupent, fortement dotés de cet «armement», des gradins entiers dans les stades. Les produits pyrotechniques, les fumigènes, les feux d’artifice, qui sont transformés en instruments d’agression, sont devenus la hantise des fervents du football qui croient aller au stade pour assister au spectacle donné par deux équipes sportives et se retrouvent exposés à une menace qui risque de leur causer un handicap physique irréversible.
Les services de la Protection civile ont attiré l’attention sur ce nouveau phénomène et sur les dégâts qu’il entraîne. De nombreux blessés sont enregistrés parmi les agents de la Protection civile et de la police affectés dans les stades. Maintenant, c’est la fête du Mouloud qui est placée sous le signe de la violence et qui donne ainsi l’occasion de «tester», en quelque sorte, ces produits pyrotechniques, destinés à des jeux d’enfants, pour leur utilisation dans les bagarres à venir. Les «opérateurs» qui importent ces produits et toute la chaîne qui les met ensuite sur le «marché» voient s’ouvrir devant eux des opportunités d’affaires juteuses d’autant plus qu’ils sont encouragés à la fois par l’incapacité des pouvoirs publics à juguler ce trafic mafieux et par les images de guerre dans les pays arabes ou musulmans – Syrie, Libye, Irak, Yémen – qui alimentent la culture de la violence chez une catégorie de jeunes abandonnés à eux-mêmes.
Les prétendues mesures prises contre l’importation de ces «bombes» ne font pas barrage à leur entrée en Algérie. Les mises en garde aux importateurs et le renforcement du contrôle n’ont pas l’efficacité exigée pour la lutte contre ce phénomène qui ne se limite plus au Mouloud. On peut trouver et acheter des produits pyrotechniques dangereux à longueur d’année dans des endroits connus de tous, aussi bien dans la capitale que dans les autres villes du pays. Personne ne croira que les circuits mafieux qui les font parvenir jusqu’aux étals des vendeurs ne peuvent être identifiés et neutralisés en amont.
D’un autre côté, il y a une clientèle parmi les parents inconscients et parmi les jeunes apprentis délinquants qui reste sourde aux campagnes de sensibilisation. Les risques liés à l’utilisation des produits pyrotechniques dangereux doivent être pris très au sérieux. Les pouvoirs publics doivent tout faire pour mettre fin à ce phénomène.
Houari Achouri
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