Maroc : nouvelle manifestation à El-Hoceima
Des milliers d’habitants d’El-Hoceima, ville du Rif, dans le nord du Maroc, sont sortis jeudi dans la rue pour protester contre la corruption, la marginalisation et la militarisation de la région, et pour aussi dénoncer les déclarations de l’alliance gouvernementale au sujet du mouvement de contestation populaire qui touche la région depuis environ six mois suite au décès de Mouhcine Fikri, mort broyé par une benne à ordures.
Des milliers de personnes se sont rassemblées en fin d’après-midi sur la place du centre-ville avant de sillonner les principales artères. Aux cris de «Vive le Rif, à bas les traitres» ou encore «Non à la militarisation !», les manifestants ont marché dans la ville, avant de se rassembler de nouveau sur la place principale où le leader du mouvement, Nasser Zefzafi, a longuement harangué la foule de quelque 200 000 personnes, selon ses estimations.
Soulignant le caractère pacifique de leur lutte, ce dernier a dénoncé «la corruption de l’exécutif et des politiciens locaux, les mafias locales, l’esprit de répression de l’Etat et de ses services de renseignement qui manipulent les institutions, la présence massive des militaires dans la ville et le sous-développement de la région». S’en prenant au gouverneur local, M. Zefzafi a, une nouvelle fois, rejeté les accusations du gouvernement, selon lesquelles la région est «motivée par des idées séparatistes», exigeant «la libération de militants de sa mouvance et la démilitarisation de la province».
Le leader de la contestation populaire dans le Rif marocain avait appelé auparavant à une grève générale et à une marche «d’un million de personnes» en guise de protestation contre les déclarations qualifiées de «provocatrices» et d’«irresponsables» des dirigeants de l’Alliance gouvernementale et contre leurs «calomnies et mensonges» sur le mouvement populaire qui secoue la région. Ce militant a voulu à travers cette action réaffirmer que les revendications de sa communauté ont trait à «l’amélioration des conditions socioéconomiques et au développement de la région loin de toute intention séparatiste», comme le prétend le gouvernement marocain.
Le porte-voix de ce mouvement de protestation a affirmé dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux que cette action «intervient en réponse aux accusations des autorités marocaines contre les activistes du Rif d’être des séparatistes et des agents à la solde de parties étrangères». «Il s’agit d’une question de droits de l’Homme englobant des revendications socioéconomiques primordiales, loin de tout appel séparatiste, comme le prétendent les autorités marocaines», a-t-il plaidé, dénonçant le désintérêt total des responsables marocains à l’égard du fondement de la protestation, en l’occurrence, a-t-il dit, «le mépris et la marginalisation systématique de cette région à tous les niveaux».
Pour montrer leur soutien à l’égard des habitants de la région du Rif, réputée frondeuse et conservatrice, d’autres citoyens relevant d’autres villes du Maroc, qui jugent «légitimes» les revendications des contestataires, ont observé des actions de solidarité. Des rapports font état d’une série d’actions à Rabat, Tétouan, Kenitra et à Hajeb et ailleurs dans le royaume, et à lesquelles ont pris part des centaines de personnes qui ont exprimé leur soutien et solidarité, et appelé les autorités à satisfaire leurs revendications en particulier et celles du peuple marocain en général. De l’avis des observateurs, cette montée au créneau est le résultat du «non sérieux» des autorités marocaines dans le règlement de la crise.
R. I.
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