La justice a-t-elle changé ?
Par Kamel Moulfi – Coup sur coup, le parquet d’Alger vient de donner deux preuves de sa volonté de montrer que la justice a peut-être changé dans notre pays. Le mandat d'arrêt contre Chakib Khelil, sa famille, Farid Bedjaoui et tous les anciens pontes de Sonatrach, mais aussi le rejet du verdict plus que clément dans l'affaire de l'enfant tué par le neveu d’Asma Benkada, à Chevalley, sur les hauteurs d’Alger, ont produit leur effet, venant de notre appareil judiciaire si peu prolixe en interventions publiques et encore moins habitué à frapper haut dans le système qui gouverne le pays. Chakib Khelil était ministre tout-puissant il y a peu de temps encore, faisant partie du premier cercle présidentiel ; Asma Benkada, notable de Mostaganem, moins connue, a tout de même défrayé la chronique comme jeune épouse puis divorcée du prêcheur de la haine, Al-Qardawi. Le procureur général près la cour d'Alger, Belkacem Zeghmati, a-t-il calculé sa frappe en visant ces deux cibles ? Est-ce un sursaut d'orgueil du parquet d'Alger et de la justice en général ? Sans doute. Belkacem Zeghmati n’a pas supporté la thèse ressassée par les médias, selon laquelle la justice algérienne n'a engagé de procédure judiciaire autour du dossier Sonatrach qu'après la mobilisation de la justice italienne. Ici même, dans Algeriepatriotique, nous avons exprimé l’opinion qui domine dans la population sur la façon dont la justice algérienne s’est laissée éclipser par son homologue italienne sur une affaire qui est d’abord la «nôtre». Sur le verdict de l’accident mortel de Chevalley, le procureur a anticipé sur la réaction d’indignation dans l’opinion publique. Le procès sera refait sur demande du parquet. Mais une hirondelle ne fait pas le printemps. C’est pourquoi il faudra du temps pour que la justice rétablisse la confiance du citoyen en elle, elle à qui les citoyens reprochent sa lenteur, le non-traitement des grosses affaires de corruption – accusée elle-même d’être gangrenée par ce fléau – et, surtout, sa dépendance envers le pouvoir exécutif. Mais il n'est jamais trop tard pour bien faire, à condition qu'elle commence par nettoyer à l'intérieur de ses rangs d'abord.
K. M.
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