Dérive dictatoriale ?
Par Karim Bouali – Scandaleux ! C’est la réaction unanime, dans les milieux de la profession, après la «descente», hier, de la gendarmerie dans les locaux de la chaîne privée algérienne Al Atlas TV. L’information a rappelé le harcèlement qu’a longtemps subi la presse indépendante dans notre pays. Elle réduit en miettes l’argument phare des partisans du quatrième mandat pour Bouteflika qui commencent leurs interventions sur les télés privées en faisant remarquer que l’existence de ces chaînes est une des «réalisations démocratiques» du pouvoir. Al Atlas TV s’est distinguée par une couverture très large de la manifestation du mouvement Barakat de jeudi dernier mettant en évidence particulièrement la brutalité de la répression policière. Les images montrant les scènes d’interpellation musclée ont été montrées en boucle pendant plusieurs heures le jour même. Mais ce n’est pas la police qui s’est chargée de fermer la chaîne. Al Atlas TV a également accordé la parole aux pro-Benflis, aux partisans du boycott de l’élection présidentielle du 17 avril ainsi qu’aux opposants à «tout le système», accompagnant ses émissions politiques de clips de Lotfi Double Kanon. Est-ce une raison pour faire taire les journalistes et animateurs de cette chaîne qui a cru en la liberté d’expression ? Y a-t-il un autre motif plus grave, comme certains le laissent entendre, genre «atteinte à la sécurité nationale» ? Le mystère sur cette perquisition effectuée par des gendarmes sur autorisation délivrée par un procureur restera entier tant que ses véritables motifs ne seront pas connus. A moins que ce soit le coup de sifflet annonçant la «fin de la récréation» ? Une sorte de rappel à l’ordre aux médias, particulièrement ceux qui sont en marge de la légalité, comme les sites d’information en ligne et les chaînes de télévision privées, pour leur faire savoir qu’il y a une ligne rouge à ne pas franchir et en même temps donner un signal d’encouragement aux chaînes (comme Al Adjwa) qui ont été créées par l’argent détourné de l’Anep (voir article dans Algeriepatriotique, le 9 mars) pour être entièrement consacrées à la campagne d’Abdelaziz Bouteflika. Va-t-on dans ce cas vers une campagne électorale à sens unique ? C’est ce que laisse penser le communiqué du Syndicat national des journalistes qui voit dans cette nouvelle atteinte à la liberté d’expression et de la presse une forme d’intimidation.
K. B.
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