Les morts aussi sont inégaux
Par R. Mahmoudi – Il y a quelque chose d’hypocrite dans la couverture médiatique exceptionnelle qui a entouré la tragédie qui vient de frapper la Tunisie. Disons-le franchement : si toutes les victimes étaient tunisiennes, s’il n’y avait pas eu des touristes étrangers, sur lesquels tous les journaux ont mis l’accent, l’événement aurait-il eu cet impact médiatique mondial qu’on a vu tout au long de cette journée de mercredi et qui intéressé, du coup, autant de personnalités influentes aussi bien en Occident qu’en Orient ? Certainement pas. Car, sinon, tous ces médias se devraient de commenter tous les massacres qui jalonnent le quotidien des Irakiens, des Syriens et des Yéménites, mais qui occupent à peine un petit espace dans les journaux télévisés des grandes chaînes d’information et les quotidiens parisiens, londoniens ou new-yorkais. Les dizaines de morts recensés – sommairement – chaque jour dans des attentats parfois plus atroces à Mossoul et à Alep n’ont pas la même valeur, aux yeux de ces faiseurs d’opinion, qu’un otage de nationalité européenne ou américaine. C’est pire que de la discrimination raciale. Ce n’est même pas de l’«eurocentrisme» – euphémisme inventé par la presse pour maquiller le racisme des Blancs. Ce mépris ancré dans les pratiques doit interpeller aujourd’hui les consciences. Cela doit inciter, en premier lieu, nos médias en Algérie et dans les autres pays du voisinage, à faire montre de plus de discernement et d’autonomie dans le traitement de ce type d’information, en évitant de reproduire machinalement et inconsciemment les prismes imposés par les médias occidentaux. Cette façon de juger des événements qui nous sont proches sous l’angle exclusif de ces médias «étrangers» ressemble davantage à un conditionnement des esprits.
R. M.
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