Et l’agriculture ?
Par Kamel Moulfi – Le silence officiel qui semble être la démarche adoptée dans l’affaire de l’exploration du gaz de schiste est rompu de temps à autre par la même litanie sur l’absence d’impact de cette activité, pourtant réputée fortement polluante sur l’eau et, donc, sur la santé des populations riveraines et l’économie de tout le pays. Faut-il rappeler que la sécurité alimentaire, enjeu prioritaire, dépend de l’eau ? Sauf si on fait le raisonnement absurde qui consiste à miser sur les ressources externes que procureront les exportations de gaz de schiste pour importer la nourriture qui nous manque. Les recettes tirées de la vente d’hydrocarbures ont toujours justifié le peu d’intérêt accordé à la production nationale et, plus grave, aux efforts pour développer l’agriculture. Pourquoi investir dans l’eau et la terre, si on peut s’en passer en achetant la sécurité alimentaire. Aujourd’hui, la combinaison de quelques chiffres devrait convaincre les plus têtus, y compris ceux qui persistent dans le genre «c’est une chèvre, même si elle vole». Les dernières données publiées par l’Office national des statistiques (ONS) nous apprennent que l’Algérie compte près de 40 millions d’habitants. A ce rythme d’accroissement démographique, la cinquantaine de millions pourrait être dépassée en une génération. Pour 2014, les importations de produits alimentaires par l’Algérie ont enregistré un niveau record, quelque 11 milliards de dollars, approchant les 15% de hausse par rapport à l’année précédente. Il s’agit de chiffres officiels, donc en principe «favorables» au gouvernement, si on pense qu’ils sont «corrigés » quelque part. C’est le Centre national de l’informatique et des statistiques des Douanes (Cnis) qui révèle que la balance du commerce extérieur de l’Algérie est au plus bas avec un déficit établi à 341 millions de dollars sur les mois de janvier et février contre un excédent de 1,71 milliard de dollars à la même période de 2014. Des chiffres rendus publics par l’APS, officielle elle aussi. De l’extérieur, nous parviennent des chiffres encore plus inquiétants, le cours du baril de Brent de la mer du Nord continue sa chute et dément les illusions de reprise des prix à la hausse. C’est le pétrole sur lequel on compte pour vivre. La solution n’est pas dans la fuite en avant vers plus d’hydrocarbures à vendre aux autres pour avoir les moyens de nourrir la population. N’est-elle pas dans le développement de l’agriculture ? Une conférence sur le commerce extérieur se tient, aujourd’hui et demain à Alger, pour parler de… la diversification des exportations. Au lieu d’une grande rencontre nationale sur l’agriculture, incluant le développement des régions sahariennes et le problème de l’eau. Urgente, celle-là.
K. M.
Comment (14)
Les commentaires sont fermés.