Ça n’a pas de «prix»
Par Meriem Sassi – Sur les quinze distinctions prévues dans le cadre du prix du président de la République du journaliste professionnel, huit seulement ont été attribuées. Le palmarès tronqué est motivé, selon le communiqué rendu public par le jury, par «l’absence de critère de qualité». Un aveu d’échec qui renseigne, à juste titre, sur le manque de formation et d’encadrement au sein de la corporation, mais surtout sur le manque d’engouement des candidats professionnels, au talent avéré, dont regorge la presse, à postuler pour un prix loin de consacrer la liberté de la presse et la libre parole au sein de la corporation. La majorité des confrères ne pouvaient que bouder un tel concours servant clairement de faire valoir au pouvoir et devant véhiculer par le biais de productions journalistiques, censées être spontanées et libres, un message de reconnaissance et de satisfaction face aux «réalisations» des différents mandats du Président. La non-attribution de sept prix, malgré tous les moyens de publicité mis en branle, est un sérieux revers pour le ministre de la Communication qui se démène depuis sa nomination pour replacer la presse dans une posture d’asservissement au pouvoir, sans possibilité de discordance ou de critique quelles qu’elles soient. Hamid Grine, investi de cette mission surréaliste, semble oublier que les professionnels de la presse sont passés par tant d’épreuves et de souffrances pour acquérir et garder leur liberté de ton menacée chaque jour, qu’ils ne sont pas prêts, quels que soient les conditions et les marchandages, à se laisser détourner de leurs principes. Si «le prix du président de la République» est présenté comme étant celui du «professionnalisme et l'éthique», les règles du jeu que tente d’imposer le pouvoir sont loin d’entrer dans ce cadre. Seules une réelle ouverture et la levée de la mainmise sur la presse publique, et la fin des chantages en tous genres subis par la presse privée consacreront une liberté réelle de la corporation. Celle-ci pourra alors choisir, en toute liberté, de vanter ou non les réalisations du président de la République, ce qui ouvrira la voie à un débat constructif et riche qui permettra de sortir la presse de sa torpeur et de l’extirper de la médiocrité et du manque de professionnalisme qui gangrène ses rangs.
M. S.
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