DRS : entre fatalité et espoir
Par Youcef Benzatat – Comment expliquer l’empathie de la majorité des Algériens avec le clan de Mohamed Mediene dans la lutte qui l’oppose à celui de Bouteflika ? Sachant que l’un et l’autre avaient contribué solidairement à la cristallisation du consensus qui a édifié le système de pouvoir ayant confisqué l’indépendance de l’Algérie au profit d’une oligarchie responsable de leur avilissement. Les Algériens n’ont jamais eu leur destin entre leurs mains. Dépossédés de leur souveraineté et de leurs richesses, leurs révoltes réprimées dans le sang et la torture, ils ont fini par admettre leur impuissance en se réfugiant dans la résignation et la fatalité. Maintenant que le système de pouvoir est entré dans un processus d’implosion, qui était déjà latent depuis que le sommet de sa hiérarchie s’était divisé en pro et anti-4e mandat au profit du président sortant Abdelaziz Bouteflika, portant l’affrontement sur la place publique à coup de procès politiques et de violences verbales, d’une part, et de défis frontaux, d’autre part, les Algériens semblent, dans leur majorité, avoir choisi leur camp. Ils jettent leur dévolu sur le clan qui leur semble le moins mauvais, celui du DRS, faute de mieux. Laminés par une dépolitisation massive sous les coups du chantage économique et social et de la terreur répressive, trahis dans leur désir d’émancipation citoyenne par une opposition compromise, divisée, anachronique par ses tendances idéologiques extrémistes, religieuses et identitaires, abandonnés par les intellectuels et les consciences éclairées ayant choisi l’exil ou la compromission, ils se sont résolus à confier leur destin à leurs bourreaux, en espérant sauver la patrie à défaut de sauver leurs âmes et consciences. Il y a dans leur soutien au clan du DRS comme un aveu d’impuissance à renouer avec la quête de leur destin. Privilégiant la sauvegarde de la seule richesse commune qui leur soit encore possible de préserver : leur patrie. Car le clan rival semble de plus en plus enclin à marchander sa survie en la bradant au plus offrant. Leur soutien au clan qui apparaît comme le moins mauvais dans cette lutte à mort, celui du DRS, ne traduit pas moins la lucidité patriotique de la conscience collective, restée intacte malgré tant de brimades et de privations. Un sursaut d’orgueil qui pourrait faire renaître l’espoir pour peu que les intellectuels et les consciences éclairées reviennent de leur démission.
Y. B.
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