Une expérience à ne pas refaire
Par Kamel Moulfi – Des centaines de familles qui habitaient des bidonvilles ou vivotaient dans des caves ou sur des terrasses d’immeubles, dans la promiscuité et l’insalubrité totale, c’est-à-dire une misère sociale indigne de l’Algérie de 2017, vont passer, pour plusieurs d’entre elles, le premier Ramadan de leur vie dans un logement décent et un environnement sain. C’est la 22e opération de relogement dans la wilaya d’Alger (voir dépêche sur AP). Des milliers d’autres familles qui sont dans une situation de précarité en matière d’habitat auront ce bonheur après l’Aïd et à la prochaine rentrée sociale, promet-on. La même opération s’est déroulée dans d’autres villes du pays. Les images des déménagements montrées à la télévision ressemblent à de la propagande, mais les «youyous» des femmes et les expressions de soulagement et de joie chez les heureux bénéficiaires sont d’une sincérité incontestable.
Une telle action exceptionnelle, comparativement au sort réservé aux plus démunis totalement abandonnés dans les pays voisins immédiats, à l’ouest et à l’est, a tendance à se banaliser chez nous. Et c’est «normal», la prise en charge par l’Etat des plus mal-logés est inscrite dans le registre de la justice sociale qui est une constante sur laquelle est fondée toute la cohésion nationale. On sait à quoi nous a conduit l’éloignement, voire à certains moments le reniement de ce qui est considéré par la population algérienne comme un devoir de l’Etat et que certains résument de façon péjorative par le «social».
La loi du plus fort («tag ‘ala men tag») – doctrine de l’Etat dans les années 1980 – qui avait marqué l’ouverture de l’économie, dans la précipitation et le désordre imposés par la pression de lobbies internes relayant celle des institutions financières internationales, a eu pour résultat une situation dont on peine encore à sortir, quelque trente ans après.
L’Algérie a payé et continue de payer cher ce «taffatouh» qui a été conseillé aux dirigeants de l’époque par des partenaires étrangers qui nous voulaient du mal, et qui a consisté à délester l’Etat de ses obligations et charges sociales dont il faisait bénéficier la population. C’est une expérience à ne plus refaire.
K. M.
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