Ordures et populisme
Par Kamel Moulfi – En moins de trois petites minutes, la caméra d’AP-TV a bien résumé la situation dramatique de la capitale livrée à la saleté et à une clochardisation rampante qui a fini par s’installer partout, y compris en son centre. A juste titre, l’incivisme des citoyens est pointé du doigt pour expliquer ce tableau peu reluisant. C’est à croire que les Algériens seraient particulièrement rétifs à la propreté et à l’esthétique des paysages et qu’ils n’aimeraient pas circuler dans une ville propre.
Pourtant, tout le monde sait que, comme leurs compatriotes dans le reste du pays, ils sont d’une rigueur absolue quand il s’agit de soigner leur domicile ; ils ne lésinent ni sur l’eau ni sur un quelconque produit d’hygiène, et encore moins sur l’effort. Comment expliquer ce paradoxe ? En fait, le manque d’éducation a pris le dessus et, avec d’autres raisons qui tiennent du contexte d’ensemble, il pousse à une sorte de désobéissance civile. Le domaine des déchets ménagers n’est pas le seul à en pâtir.
Mais si les citoyens sont totalement impliqués dans cette situation déplorable à cause de leur incivisme, qu’en est-il des autorités ? Les gestionnaires locaux, entre élus et administratifs, n’ont-ils pas leur part de responsabilité ? Sont-ils indifférents, eux-aussi, au sort de leurs communes ? Sans doute pas ! Que font-ils alors pour y remédier ? La gestion d’une commune n’est pas une mince affaire. Elle exige des compétences, des qualifications et des aptitudes qui sont loin d’être partout réunies.
Quand on ajoute le constat de la marginalisation des élites locales indésirables pour des tas de raisons connues, on comprend mieux pourquoi le simple ramassage des ordures devient un problème insoluble. Et il le restera tant que les principaux concernés –citoyens et gestionnaires – persisteront à s’ignorer mutuellement et à se rejeter la balle indéfiniment.
Dans ce qui ressemble à une impasse, la loi est faite pour offrir l’issue de sortie, à condition d’admettre qu’elle est au-dessus de tous et à condition aussi qu’elle soit explicitée à tous ceux, citoyens et élus, appelés à la mettre en application. Alors, le miracle pourrait surgir faisant disparaître le populisme qui, sur fond d’ambitions politiques souvent démesurées, motive le laisser-aller en toutes choses.
K. M.
Comment (8)