Colonisation : Bouteflika met à l’épreuve l’engagement d’Emmanuel Macron
La demande réitérée hier, mercredi, par le président Bouteflika, à l’occasion de la fête de l’Indépendance, d’une reconnaissance des «souffrances» du peuple algérien de la part du colonisateur français n’a pas eu de réactions officielles immédiates, bien que l’exigence de l’Algérie, telle que formulée cette fois-ci, soit assez pondérée, comparée à la demande de «pardon» qui, naguère, divisait la classe politique française.
Ceci dit, on s’attendait à un mot sur cette question de la part du président fraîchement élu, Emmanuel Macron, qui avait, en février dernier, en pleine campagne électorale, bousculé les mauvaises consciences françaises, en reconnaissant à Alger la colonisation comme «un crime contre l’humanité». Une déclaration sur laquelle il reviendra quelques jours plus tard, mais tout en maintenant son avis sur les «peines» et «souffrances» qu’ont enduré les peuples colonisés.
Ce rappel du président Bouteflika met à l’épreuve l’engagement du chef de l’Etat français, exprimé solennellement, pour relancer les relations entre les deux pays, et concrétiser «le partenariat d’exception» que l’Algérie et la France s’étaient promis de réaliser depuis la visite d’Etat de Jacques Chirac, en février 2003 à Alger, et réaffirmée lors du voyage de François Hollande en décembre 2012. Mais, à chaque fois, les bonnes intentions butaient sur une crispation épidermique de la classe politique française, qui, au nom d’une fierté nationale sacralisée, rejetait l’idée de s’excuser ou de se repentir pour ce qu’a commis l’armée coloniale. Ce repli poussera le Parlement français à voter, à l’unanimité des voix, la fameuse loi du 23 février 2005 glorifiant «les aspects positifs de la colonisation» et dont l’objectif était d’empêcher justement toute «tentation» de demander pardon à l’Algérie. Dans les débats, les plus indulgents qualifient cette demande de repentance d’«utopie» qui risque d’ouvrir la boîte de Pandore pour les Français.
Les chefs d’Etat français successifs, y compris Nicolas Sarkozy, ont eu plusieurs petits gestes qui allaient dans le sens de la réconciliation. Mais, à chaque fois, la partie française se rebiffe et refuse de donner une forme aux multiples acquis réalisés à chaque étape. Or, tant que rien n’est consigné noir sur blanc, le litige sur la colonisation continuera à handicaper les relations entre les deux rives.
R. Mahmoudi
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