Artifices agaçants
Par Kamel Moulfi – Tout est fait pour que la rentrée sociale, dans moins d’un mois déjà, se déroule dans le calme annoncé par le Premier ministre, Abdelmadjid Tebboune. C’est la priorité du jour.
Les velléités de protestation sont bloquées en amont, sur les voies qui mènent à Alger, quand elles cherchent à se manifester, alors qu’une anticipation, en apparence intelligente, tend à neutraliser les signes de mécontentement futur, les revendications qui les motivent étant satisfaites avant d’être exprimées. C’est ainsi que l’on peut expliquer aussi bien les témoignages entendus dans la rue, au café ou sur la plage à propos des bouchons qui empoisonnent les déplacements des vacanciers, que les images vues à la télévision concernant, par exemple, les indemnisations accordées par l’Etat aux sinistrés des incendies de forêt.
Les derniers mois de l’année sont hâtivement préparés ces jours-ci par le pouvoir, non seulement pour maintenir la paix sociale, mais aussi et surtout pour récupérer le «lien» avec la population. Sur ce second point, la mission s’avère pour le moins difficile, surtout parmi les jeunes. Les artifices utilisés pour les distraire de leurs préoccupations pressantes ne les trompent plus, voire commencent à les agacer. Vers la fin novembre, les élections locales pour le renouvellement des assemblées populaires communales et de wilaya seront le test qui permettra de savoir dans quelle mesure le pouvoir a réussi à combler le fossé qui le sépare de la grande masse des citoyens et qui avait révélé son inquiétante ampleur à travers l’abstention massive aux législatives du 4 mai dernier.
Mais les dirigeants des partis politiques se préoccupent moins de gagner l’adhésion de la société que du nombre de communes et de wilayas dont ils obtiendront la «majorité» des voix. Le taux d’abstention – corrigeable éventuellement – ne semble pas un facteur important pour eux, ils savent qu’ils peuvent recourir à la comparaison avec d’autres pays pour le banaliser et en neutraliser le poids auprès de l’opinion publique nationale et internationale. Auparavant, ce qui importe pour les dirigeants des partis, c’est de garder intacts les rangs de leurs formations, généralement fortement ébranlés par l’étape de confection des listes de candidatures. Quant aux jeunes, impatients de voir leur situation s’améliorer vraiment, ils attendront.
K. M.
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