La communication officielle détournée : simple cafouillage ou clash au sommet ?
Une première dans les annales de la communication officielle : une instruction présidentielle – ou présentée comme telle – a été diffusée en exclusivité par un canal médiatique privé pour être reprise ensuite, in extenso et sans émettre le moindre doute, par l’ensemble des médias nationaux, à l’exception de l’agence officielle et des organes de presse publique.
Pourquoi cette instruction n’a-t-elle pas été rendue publique par voie de communiqué officiel portant la signature de la Présidence de la République, comme cela a toujours été le cas ? Comment se fait-il que le directeur de cabinet du Président, Ahmed Ouyahia, se retrouve écarté du circuit par lequel cette instruction a été produite puis diffusée, alors que l’opération relève normalement de ses prérogatives ? Pourquoi le choix d’une chaîne de télévision privée, alors que l’Etat dispose d’une agence de presse officielle et de médias lourds – aux sens propre et figuré ? Autant de questions qui resteront sans réponse mais qui nous interpellent d’ores et déjà sur la façon dont est gérée la communication officielle et, par ricochet, la prise de décision au plus haut sommet de l’Etat.
Tout indique que la diffusion de cette instruction du chef de l’Etat par un média privé est loin d’être un acte isolé ; elle semble plutôt participer d’une démarche globale bien réfléchie. Elle survient deux jours seulement après l’annonce en exclusivité, faite par le même canal, d’une visite effectuée par le Premier ministre à Paris, où il a rencontré son homologue français. Information donnée avant même l’APS et la Télévision nationale. Visiblement dépassées, ces dernières ont été incapables de démentir les allégations contenues dans l’information concernant l’objet du déplacement d’Abdelmadjid Tebboune ou d’en donner «la version officielle». C’est encore une fois par voie de déclaration officieuse (lire notre article) que le Premier ministre s’est exprimé sur cet événement.
Tout ce cafouillage accrédite la thèse selon laquelle ce détournement de la communication officielle trahit un blocage politique au sommet du pouvoir.
R. Mahmoudi
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