Attention, vous fumez des cigarettes commercialisées par des terroristes !
Par Hani Abdi – Les groupes terroristes qui infestent la Libye et plusieurs régions d’Afrique du Nord se mettent à la contrebande de cigarettes. Selon une enquête réalisée par la chaîne de télévision Al-Arabiya, de grosses quantités de cigarettes sont commercialisées par les groupes terroristes, qui profitent, entre autres, du chaos libyen et de la situation critique dans les pays du Sahel. Selon cette enquête, trois quarts des cigarettes en vente en Libye sont commercialisés de manière illégale. Aussi, 13 milliards de cigarettes consommées dans le Maghreb sont d’origine inconnue.
Tout comme le pétrole au Moyen-Orient, les experts ont averti contre le commerce des cigarettes et la contrebande des produits de consommation qui sont totalement tombés entre les mains des groupes terroristes au Maghreb et qui sont devenus une source majeure de leur financement. Le contrôle du marché de la cigarette est tel que connaître l’origine du produit est devenue une préoccupation pour les fumeurs aussi bien en Libye qu’en Tunisie.
L’enquête admet qu’en Algérie, c’est un peu différent, en ce sens que plusieurs marques de cigarettes sont fabriquées localement par des entreprises connues et identifiées. La chercheuse au Centre Carnegie de Beyrouth, Dalia Ghanem Yazbek, estime que la contrebande de la cigarette est devenue au Moyen-Orient et au Maghreb une source de revenus «très lucrative pour les groupes terroristes», parce que les frontières entre les Etats déstabilisés par les «révoltes arabes» sont devenues poreuses. Elle relève également du manque de moyens dont souffrent la plupart des services de sécurité des pays et en particulier ceux de la Corne de l’Afrique et du Sahel.
D’ailleurs, après avoir été pourchassé par les services de sécurité algériens, le chef terroriste Mokhtar Belmokhtar, cité dans cette enquête, s’est réfugié dans la bande sahélo-sahélienne où il fait depuis des années de la contrebande de cigarettes sa principale source de financement. Cela au point qu’il soit surnommé «Mister Marlboro». Si les groupes terroristes s’intéressent particulièrement à la cigarette, c’est parce qu’elle constitue un gros marché en Afrique du Nord. Selon l’Office des Nations unies de lutte contre la drogue et le crime, 400 milliards de cigarettes sont consommées annuellement en Afrique du Nord, dont 60 milliards sont achetées sur les marchés noirs. Il se peut donc qu’un fumeur algérien tombe sur des cigarettes issues de la contrebande. La taille totale des profits du commerce informel du tabac en Afrique du Nord dépasse un milliard de dollars, ajoute le même office onusien cité dans l’enquête. Ainsi, après avoir fait de l’enlèvement d’étrangers et leur libération contre le paiement de rançons leur business, les groupes terroristes se consacrent désormais au marché juteux de la cigarette.
Pour la chercheuse Dalia Yazbek, quand les groupes terroristes ne sont pas directement impliqués dans les opérations de contrebande de cigarettes, ils font payer aux contrebandiers des «taxes de passage et de sécurisation des marchandises». Cette chercheuse du Centre Carnegie de Beyrouth met en garde contre la difficulté à traiter ce commerce illégal, qui constitue «une source majeure de financement pour le terrorisme». Elle alerte sur le fait que beaucoup de gens au Moyen-Orient sont aujourd’hui impliqués dans ce commerce qui ne cesse de se développer.
H. A.
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