Pourquoi Chakib Khelil multiplie les attaques contre Ahmed Ouyahia
Par Hani Abdi – L’ex-ministre de l’Energie, Chakib Khelil, enchaîne les interventions critiques envers l’action du gouvernement. Après Khenchela et Tamanrasset, Chakib Khelil prévient à partir d’Oran contre la «fonte» plus vite que prévu des réserves de change et considère la stratégie du gouvernement pour réduire le déficit comme inadaptée à la situation que traverse le pays.
L’ex-ministre de l’Energie, dont le nom a été longtemps associé aux scandales de corruption qui ont secoué Sonatrach, a déjà critiqué le recours au financement non conventionnel, qu’il considérait comme générateur d’inflation. Cela, pourtant, Ahmed Ouyahia, en tant que secrétaire général du RND, l’avait ouvertement et énergiquement défendu, en considérant qu’il avait été victime d’une grave injustice dans l’affaire Sonatrach.
Pourquoi Chakib Khelil multiplie les attaques contre le Premier ministre, allant jusqu’à remettre en cause le plan d’action du gouvernement qui découle du programme du président Bouteflika ? A quoi joue l’ex-ministre de l’Energie ? La réponse est peut-être dans ce qu’il qualifie de choix économique salvateur pour le pays, à savoir l’investissement direct étranger (IDE). Dans toutes ses dernières conférences, Chakib Khelil, proche des mastodontes américains, plaidait pour la levée de tous les blocages et contraintes possibles aux IDE.
Pour lui, les IDE sont les seuls investissements générateurs de devises et capables de «renflouer» les caisses de l’Etat dans cette conjoncture marquée par le déclin de la production pétrolière doublée de la chute continue des prix de l’or noir. Et s’il critique Ahmed Ouyahia, c’est parce que ce dernier ne partage pas le même enthousiasme que lui sur le rôle que peuvent jouer les IDE dans le développement de l’économie nationale.
Pour Ahmed Ouyahia, les IDE, qui ne sont pas orientés vers l’exportation, constitueraient à terme un fardeau plus qu’un avantage pour la trésorerie du pays, en ce sens que les détenteurs de ces investissements vont transférer leurs dividendes en monnaie sonnante et trébuchante. Une vision partagée par certains économistes, qui qualifient les dividendes des investissements des multinationales qui ne génèrent pas de devises de «nouvelle dette extérieure».
Le «tout-IDE» pour lequel plaide Chakib Khelil ne trouve donc pas écho chez le gouvernement d’Ahmed Ouyahia, qui préfère stimuler davantage le privé national et l’aider à se hisser au niveau régional, voire international en matière de qualité de production et d’innovation. Les attaques de Chakib Khelil traduisent-elles le mécontentement de certains mastodontes internationaux qui chercheraient à s’emparer de certaines activités juteuses en Algérie ?
Possible, au regard de l’insistance de Chakib Khelil sur les IDE qui, pour lui, «sortiraient l’Algérie de la crise actuelle». A cela s’ajouterait l’ambition politique de l’ex-ministre de l’Energie, qui se prépare pour aller à la conquête d’El-Mouradia à la faveur de la présidentielle de 2019. Depuis son retour tonitruant en mars 2016, Chakib Khelil sort du secteur des hydrocarbures pour se donner une dimension plus important d’un homme qui a un regard, une vision et une stratégie claire, précise, chiffrée et définie dans le temps pour faire prospérer l’économie nationale.
H. A.
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