Contribution – Le salut de l’Algérie ne viendra ni du pétrole ni de l’austérité
Par Nasser Chali – C’est pendant les périodes de crise que les nageurs en eaux troubles foisonnent. Le marché noir se développera, l’inflation sera galopante, les déficits s’aggraveront, les fuites de capitaux seront multipliées et tout cela retombera sur le petit peuple qui n’aura d’autres solutions que la rue. C’est ce que préconise votre éditorial intitulé «Vive la crise !»
Le salut de l’Algérie ne viendra ni du pétrole, encore moins de l’austérité mais d’un retour aux sources salvateur. Donner toute son importance à la ruralité. Valoriser les petites fermes individuelles, en aidant les petits fermiers loin de la bureaucratie. L’élevage bovin actuellement nourrit beaucoup de familles dans mon village, en montagne. D’après un expert algérien à Montpellier, l’essentiel de l’agriculture française provient des petits exploitants. Au lieu de commander des études sur le secteur agricole qui n’ont jamais été appliquées, il est urgent de demander à ces petits fermiers de quoi ils souffrent. Les foires agricoles dans chaque wilaya seraient un immense débouché pour ces artisans de la terre.
Une bonne fois pour toutes, privatiser. Dans un pays rongé par la corruption et le clientélisme, on ne doit pas confier aux affairistes le destin des entreprises publiques qui, à la fin de l’année, sont toujours déficitaires. L’Etat ne doit pas vendre des bonbons ou des cartables mais doit créer des conditions favorables à l’investissement privé, seul générateur d’emplois et qui ne rongent pas le budget de l’Etat.
Dans toutes les économies qui ont réussi, l’économie est aux mains du privé.
Tordre le cou à la bureaucratie. Comment quelqu’un qui est assis au chaud dans son bureau peut-il donner des ordres à quelqu’un qui veut créer des milliers d’emplois ? C’est un non-sens. Les directives du gouvernement ne doivent pas être prises à tâtons (licence d’importation, usine de montage…). Il faut faire vite, très vite. Un investisseur ne doit rencontrer aucun problème administratif (Rebrab souffre encore, et son seul souci est de créer des emplois, c’est inadmissible mais pourtant vrai). D’autres pays lui font les yeux doux.
Le tourisme que d’aucuns appellent la mondialisation heureuse est moribond chez nous. Il est temps de donner la parole aux professionnels de ce secteur et non aux fonctionnaires du tourisme. La Tunisie et le Maroc nous ont dépassés dans ce domaine malgré l’immensité de nos potentialités. Le 49/51 dans les partenariats industriels est un handicap sérieux pour l’investissement étranger. On veut être très nationalistes alors qu’on importe presque tout et on crée de l’emploi et on résout le problème du chômage pour d’autres nations.
Il faut à jamais mettre des limites et des délais pour toutes les opérations relevant de l’investissement. Il y a des investisseurs qui ont attendu un an pour avoir un permis de construction pour l’implantation d’une usine.
Vous me diriez qu’on ne peut rien faire, qu’il y a des freins partout et qu’on doit se résigner. C’est faux. Il y a des gens, et beaucoup, qui veulent travailler et sortir le pays de son arriération. C’est à ces gens-là qu’il faut «dérouler le tapis rouge» et non aux experts des dizaines de partis politiques qui s’ accaparent les mass medias et ne vendent que des rêves périmés.
Gageons que cette année sera celle de l’innovation dans notre manière d’être et que chacun s’y mette.
Le temps presse. Sortons de la mentalité du consommateur pour être chacun de son côté un producteur, ne serait-ce que dans notre manière de penser. Il ne faut surtout pas que nous soyons nous-mêmes les instruments de notre propre aliénation.
Bonne année a tous et à toutes.
Nasser Chali, enseignant, Toronto
Dernier livre paru : L’Apatride (éditions l’Harmattan, 2017)
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