Ils multiplient les ingérences : que cherchent les Saoudiens en Afrique ?
Par Sadek Sahraoui – L’Arabie Saoudite a saisi la perche récemment tendue par la France dans le cadre du dossier du G5 Sahel pour renforcer sa présence dans la région et essayer de peser sur certains dossiers aussi cruciaux que celui de la Libye et de la lutte contre le terrorisme. Adel Ben Ahmed Al-Joubeir, le ministre saoudien des Affaires étrangères, enchaîne, d’ailleurs, actuellement les voyages sur le continent afin de réaliser les nouvelles ambitions diplomatiques de la monarchie wahhabite. Le dernier voyage du chef de la diplomatie saoudienne en Afrique est très récent puisqu’il était encore au Congo-Brazzaville pas plus tard qu’hier.
Au sortir d’un entretien lundi avec le chef de l’Etat congolais, Denis Sassou-Nguesso, Adel Ben Ahmed Al-Joubeir n’a pas caché, à ce propos, l’intérêt de son pays pour les questions de sécurité de façon générale. «L’Arabie Saoudite travaille conjointement avec les Etats-Unis, la France et l’Allemagne pour trouver des solutions dans la zone Sahel», a-t-il indiqué, rappelant que les autorités saoudiennes contribuent déjà à hauteur de 100 millions d’euros pour soutenir les opérations des pays concernés sur les plans logistique, militaire, mais aussi en soutien aérien. Cette déclaration prête un peu à sourire puisqu’il n’y a pas très longtemps, l’Arabie Saoudite était accusée de soutenir le terrorisme international. Riyad est connu, par exemple, pour avoir financé les gros des mosquées salafistes d’Afrique et encouragé le wahhabisme à coups de millions de dollars.
Le chef de la diplomatie saoudienne a soutenu à l’occasion que la solution aux problèmes du terrorisme dans la région passe aussi par la stabilisation de la situation en Libye. «Nous avons émis le souhait de réunir nos envoyés spéciaux – celui du Congo, de l’Europe et de notre pays – afin de conjuguer les efforts pour trouver une solution à la crise libyenne de manière à ce que ce pays renoue avec la vie normale et dispose d’un gouvernement stable après les prochaines élections», a-t-il indiqué.
En qualité de quoi l’Arabie Saoudite va-t-elle réunir tous ces acteurs ? Evidemment, Adel Ben Ahmed Aal-Joubeir ne le dit pas. Mais, à travers sa déclaration, il apparaît clairement que Riyad cherche à imposer son agenda et à peser sur le dossier. Un dossier dans lequel sont également beaucoup impliqués les Emirats arabes unis, le Qatar et à un degré moindre la Turquie, pour ce qui est des pays du Proche-Orient.
Le forcing fait par l’Arabie Saoudite en Afrique pourrait aussi s’expliquer par le souci du prince héritier Mohammed Ben Salman de ne pas se laisser distancer par Cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani qui a lui aussi effectué récemment une visite de plusieurs jours sur le continent. Les Saoudiens cherchent-ils à faire de l’Afrique une terre d’affrontement entre eux et le Qatar ? Possible. Mais dans tous les cas, l’Arabie Saoudite affiche une volonté claire de s’ingérer dans les affaires du continent. Et cela, c’est très inquiétant.
S. S.
Comment (13)