La CAN-2018 de handball divise les Gabonais : entre engouement et rejet
Entre ceux qui estiment que l’abriter est une occasion de faire sortir le Gabon de l’anonymat et ceux qui la boycottent, jamais l’organisation d’une Coupe d’Afrique des nations (CAN) de handball n’aura fait couler autant d’encre que celle de la 23e édition qui se déroule du 17 au 27 janvier à Libreville. Dans un pays qui tire la moitié de ses recettes budgétaires de l’or noir, d’aucuns estiment que l’argent ayant servi à la construction par les Chinois du clinquant Palais des sports de la capitale, théâtre des 32 matches de la CAN-2018, aurait pu être investi dans des «projets plus importants», dans un contexte économique mondial difficile marqué par une chute drastique du prix du baril de pétrole.
«Comme toujours, il y a les pour et les contre. Ces derniers auraient aimé que l’’enveloppe financière débloquée pour la construction du Palais des sports soit destinée aux secteurs de la santé et de l’éducation où il y a beaucoup de retard à rattraper», a expliqué à l’APS Carel Okaye, journaliste gabonais au quotidien d’information générale africaine Times info. Il y a aussi les pour, «et ils sont beaucoup, sinon la salle ne serait pas pleine à craquer à chaque match des Panthères», a-t-il argumenté, en montrant du doigt le nombreux public venu assister au match Gabon-Tunisie de vendredi soir.
Mais ce qu’Okaye oublie de dire, c’est que les organisateurs ont opté pour la gratuité d’entrée au Palais des sports afin d’assurer le maximum de présents de toutes les franges de la société aux matches, notamment ceux du Gabon, alors que les autres rencontres se déroulent devant des gradins presque vides dans l’indifférence la plus totale. Ainsi, c’est le même scénario qui se répète pour les Gabonais, lesquels, à chaque événement sportif organisé par leur pays, sont divisés, comme en 2017 pour la CAN de football quand il y a eu même des menaces de sabotage et en 2018 donc pour le handball.
«Bienvenue au Gabon, vous êtes chez vous, on est là pour vous servir», lancent des volontaires aux quelques étrangers venus assister aux rencontres, histoire de leur «vendre» la CAN, alors que, après chaque sortie des protégés de Jackson Richardson, les Gabonais refont le match avec une passion indescriptible, signe de leur acceptation du tournoi. «Regardez où est-ce qu’on vit et vous voulez que je parle de handball ou de Coupe d’Afrique ?», lance cependant un quadragénaire dont la baraque qui jouxte un fleuve où sont déversées les eaux usées menace de s’effondrer.
Libreville demeure égale à elle-même. Les infrastructures, notamment les voies de communications urbaines pour la plupart vieillissantes, n’ont pas eu droit à une cure de jouvence. A part l’embellissement de quelques grands axes, comme le boulevard et un semblant de peinture sur les bornes de voies urbaines dans les quartiers populaires, rien de nouveau sous le soleil de plomb de la saison des pluies.
R. S.