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Une voix singulière

Par Abdelkader S. – Ariella Aïsha Azoulay incarne une voix singulière et profondément nécessaire dans le paysage intellectuel contemporain. Dans l’entretien qu’elle accorde à Algeriepatriotique, elle livre bien plus qu’un témoignage personnel. Elle trace les contours d’un combat décolonial rigoureux et sensible, inscrit dans une mémoire étouffée par les récits dominants. Son retour en Algérie n’est pas un simple acte symbolique, mais une réaffirmation d’une appartenance niée. Elle y revient en tant que «juive algérienne», une identité que le décret Crémieux, les politiques coloniales françaises et le sionisme ont tenté de dissoudre au profit d’une francisation forcée ou d’une uniformisation israélienne.

Ce qui frappe dans ses propos, c’est la clarté avec laquelle elle déconstruit les identités imposées. Elle ne se laisse pas piéger par les catégories figées du discours occidental, qu’il s’agisse de «juive mizrahi», de «citoyenne israélienne» ou de toute autre étiquette construite pour domestiquer une pluralité que le colonialisme s’est acharné à effacer. Ariella Aïsha Azoulay oppose à ces assignations une mémoire vive et plurielle, celle d’un monde judéo-musulman, longtemps vivant, aujourd’hui enfoui, mais encore audible dans les bijoux, les noms, les prières, les silences. Son approche n’est ni nostalgique ni passéiste. Elle est tournée vers la réparation, la continuité et la possibilité de renouer avec ce qui fut brisé.

Elle porte également un regard lucide sur les stratégies occidentales contemporaines. Face aux violences génocidaires à Gaza, elle dénonce la reconnaissance opportuniste d’un Etat palestinien vide de toute réalité, tant que le soutien logistique et militaire à Israël se poursuit. Elle rappelle que l’antisémitisme n’est pas né dans les sociétés arabo-musulmanes, mais dans l’Europe chrétienne, et que son instrumentalisation actuelle sert avant tout à délégitimer les luttes anticoloniales. Par son travail intellectuel, artistique et politique, Ariella Aïsha Azoulay redonne chair à une mémoire partagée, où musulmans et juifs vivaient côte à côte, non pas dans un mythe, mais dans une réalité historique que l’on tente aujourd’hui d’effacer.

Sa parole est rare, précieuse, dérangeante – donc indispensable. Elle nous rappelle que la vérité ne se situe pas dans les discours officiels, mais dans les voix étouffées qui renaissent, parfois, à travers une simple prière, un prénom retrouvé ou une maison abandonnée.

A. S.

3 Commentaires

  1. Ariella Aïsha Azoulay a échappé à la malédiction du décret crémieux qui se transmet de génération en génération chez ceux qui refont l’histoire comme ça les arrange en omettant d’expliquer à son public et autres fanzouzes ultra sionisés que son raymond roulait en fait pour l’oas et travaillait secrètement pour le mossad. Ça ratonnait chez eux donc faut pas s’étonner des jérémiades ridicules de paul et les autres. C’est ce qui arrive quand on est au pied du mur. On n’est pas amnésique …
    M’enfin gaston, pourquoi tu tousses?

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  2. Le ‘combat décolonial rigoureux et sensible’ d’Ariella Aïsha Azoulay semble beaucoup plus crédible et désintéressé que celui d’une rokhaya diallo qui est complètement vendue au système et mentalement colonisée, ou celui d’une rima hassan dont l’ambition calculée et l’arrivisme prétentieux ne sont plus à prouver. Deux soumises à l’empire qu’elles dénoncent. Étonnant, non ? Comme dirait l’autre …

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  3. parlant de la parole de A. A. A., A. S. conclut qu’elle est dérangeante.
    en effet, la parole de la Dame est non seulement dérengeante mais s’inscrit, particulièrement en faux par rapport aux discours sionistes et islamistes qui veulent présenter le conflit palestino-sioniste comme un conflit de religion et/ou de civilisation, d’une part et certains idéologues algériens, d’autre part, qui tentent, vainement, d’insérer notre glorieuse lutte anti-coloniale dans une soi disant problématique de « race » et/ou de religion et de réduire les algériens à des arabo-amazigho-musulmans.

    Wa el fahem yefhem.

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