Si Hasni, Guenzet et Alloula étaient vivants…
Par Saadeddine Kouidri – Si Medjoubi, L’hachmi, Aziz… étaient vivants, ils ne feraient aucun reproche à Slimane Benaïssa, au contraire. Il est resté vivant est c’est ce qui compte avant tout, en espérant que sa promotion avantage la culture. Il est, grâce à sa grande expérience, potentiellement un excellent conseiller du ministre dans son pays. Y a-t-il un spectateur qui ait vu Babor et qui ne l’ait pas aimé ? L’homme est un dramaturge de talent. Il a, pour des considérations personnelles, quitté le pays à des moments où nous avions tous besoin de solidarité ; c’est vrai, mais il faut souligner qu’elle ne se manifestait que rarement.
Les victimes du terrorisme dans la capitale étaient enterrées parfois sans la présence de leurs propres proches ! Ils n’étaient pas loin, certes, mais planqués, terrassés par la peur. Benaïssa a, pour des raisons familiales, personnelles opté pour la double nationalité à l’instar de centaine de milliers de personnes. Il est retourné il y a quelques années dans son pays – et c’est ce qui reste le plus important – contrairement à beaucoup d’autres. Des intellectuels de haute facture comme le dramaturge Kaddour Naïmi et le professeur Abdellali Merdaci lui reprochent d’avoir été nommé comme cadre supérieur au ministère de la Culture. Or, s’il y a un reproche à faire, à qui doit-on l’adresser ?
Il faut rappeler que le grand Mohamed Belouizdad travaillait au gouvernement général de la France coloniale. Tous les Allemands qui travaillaient dans le régime nazi n’étaient pas des nazis. Tous les fonctionnaires de la France coloniale n’étaient pas pour le colonialisme… En Algérie, les islamistes sont de plus en plus nombreux dans l’administration depuis que Chadli les a élevés anticonstitutionnellement au rang de partenaires politiques, mais cela ne veut pas dire que l’administration a viré sa cuti – ou du moins jusqu’à présent – et la présence de notre dramaturge est de bon augure dans ce cas.
Certains peuvent ne pas être d’accord avec cette nomination et c’est leur droit. Mais il ne faut pas être injuste envers cet homme.
Je termine en rappelant que nos ministres de la Culture ont ce point commun qui fait leur exception et qui reste, à ce jour, étranger à la majorité de nos intellectuels d’ici ou d’ailleurs : celui de dire aux islamistes que leur place est au musée. Même s’il ne se distingue qu’en cela, le ministre devient crédible. Il se démarque de certains de ses collègues au sein du gouvernement. Et c’est salvateur.
S. K.
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