Opérer sa mue
Par Nouredine Benferhat – Les idées ne prennent consistance qu’au sein de systèmes constitués par des concepts associés de façon solidaire et dont l’agencement est établi par des liens logiques. Un système d’idées peut prendre, selon les penseurs, deux formes : une forme ouverte (la théorie) et une forme close (la doctrine).
La doctrine s’auto-justifie par la référence à la pensée de ses fondateurs. Elle se veut invulnérable à tout ce qui peut la contredire. Elle peut durer très longtemps car elle plaît et satisfait la libido de ceux qui la nourrissent.
Au contraire, la théorie peut tenir compte des événements extérieurs, quitte donc à évoluer. Si on tient compte de la vision de K. Poper, la théorie accepte le principe de sa réfutation. Elle reconnaît l’éventualité d’être remplacée par une autre théorie qui répond mieux qu’elle au critère qu’est l’exigence de s’articuler sur des faits et des événements, tout en conservant une certaine cohérence intérieure.
La doctrine refuse toute critique et manie l’anathème. La théorie accepte, quant à elle, les critiques sous certaines conditions, mais elle est animée d’une vigueur polémiste. Le danger est d’être possédé par ses idées sans être capable de discuter avec elle. C’est ce qui semble être le cas des doctrines de nos partis politiques, dont les idées semblent sortir du même moule estampillées d’une manifeste absence d’imagination.
C’est ce qui explique, peut-être, que les hommes du pouvoir reproduisent les mêmes gestes et distribuent la même mythologie, devenant, en quelque sorte, interchangeables puisque incapables de percevoir la réalité et d’anticiper l’action.
A un certain degré de développement d’une société, les institutions politiques entrent de plus en plus en contradiction avec les réalités sociales.
Il n’est pas trop tard pour certains partis d’opérer leur mue en favorisant le débat utile pour être en phase avec la société et éviter toutes confrontations avec elle. Sans cesser d’être possédés par leurs idées, ils devront les contrôler, les vérifier et, le cas échéant, les abandonner.
N. B.
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