Contribution : «De la nécessité d’une industrie automobile en Algérie»
Et si tous les constructeurs automobiles présents sur le marché algérien (soit plus de 35) font de bonnes affaires en Algérie, aucun d’entre eux n'a pris, jusqu’à présent, d’engagement de nature vraiment industrielle. Récemment, un des leaders du marché tablait sur le chiffre record de 250 000 nouvelles immatriculations cette année. Un déferlement de véhicules importés dans le pays qui n'aura été accompagné jusque-là que de lots de pièces de rechange et d’un service après-vente réduit à sa plus simple signification. Aussi, le secteur automobile est un secteur d’activité très dynamique et très lucratif mais sans aucun impact économique structurant. Le manque d’intérêt manifesté par les grands constructeurs étrangers, notamment français, pour l’investissement direct dans le secteur de la mécanique et de l’industrie de l’automobile dans notre pays n’en a été que plus criant. Les assises nationales sur la stratégie industrielle avaient déjà démontré la nécessité de relancer l’industrie algérienne et notamment le secteur de la mécanique marqué, depuis de nombreuses années, par un très fort désinvestissement. La mécanique est aujourd’hui au centre de tout processus de revitalisation industrielle digne de ce nom. Elle est, en tous cas, indispensable pour aller vers des industries techniquement et technologiquement plus élaborées comme celles du secteur de l’automobile. Par ailleurs, le fait que les participants aux assises sur la stratégie industrielle se soient particulièrement intéressés à l’industrie automobile et mécanique confirme, si besoin est, l’existence d’opportunités d’affaires et d’investissement. C’est pourquoi, nous soutenons, pour notre part, sans réserve tous les efforts des autorités algériennes visant à l’implantation d’usines de fabrication de véhicules dans notre pays. C’est une exigence «minimale» et qui reste tout à fait légitime lorsque l’on regarde les potentialités de l’Algérie dans ce domaine. Il y a lieu de rappeler également que notre pays est le seul au Maghreb à savoir fabriquer des camions, des tracteurs, des équipements pour engins industriels et utilitaires. Les conditions de production y sont par ailleurs extrêmement intéressantes en ce qui concerne les coûts si on les compare à ceux en vigueur dans d’autres pays bénéficiant actuellement d’IDE dans le secteur. Il faut rappeler également que jusqu’à la fin des années 60, il y avait à El-Harrach une usine de montage Renault d’où sortaient des R4, des R8 et plus tard des R16. A l’époque, l’Etat avait décidé d’adjoindre cette unité à la société nationale Sonacome qui avait choisi alors d’y fabriquer des équipements pour travaux publics comme les dumpers ou les bétonnières. D’aucuns sont convaincus que si cette usine n’avait pas changé de vocation, elle aurait certainement réussi et contribué à l’émergence de nombreux sous-traitants dans les produits plastiques, la fabrication de sièges, les batteries, l’équipement électrique et autres accessoires. De ce point de vue, l’Algérie dispose incontestablement d’avantages comparatifs non négligeables qui peuvent permettre d’être compétitifs et favoriser des politiques de délocalisation en direction de notre industrie.
Sur un autre plan, le pouvoir d’achat de notre pays s'étant nettement renforcé grâce à nos potentialités énergétiques, il est permis d'envisager, à présent, de mieux valoriser, auprès des constructeurs automobiles, notre expérience industrielle, la technicité de notre main-d'œuvre ou encore le dynamisme de notre marché intérieur. Les opérateurs nationaux, au premier rang les concessionnaires automobiles, doivent démontrer, à l’avenir, leur disponibilité à générer des processus industriels nationaux. La sous-traitance est considérée aujourd’hui partout à travers le monde comme un moyen privilégié de développement. C’est donc une démarche qui n’est pas très originale puisqu’elle prévaut aux quatre coins du monde. Liées de manière indissoluble aux entreprises donneuses d’ordres, les entreprises sous-traitantes sont exposées (plus que toutes les autres) aux aléas d’un marché concurrentiel et très exigeant. Il parait, donc, plus indiqué dans un tel contexte, d’appréhender la sous-traitance comme un moyen de promouvoir la création d’entreprises et de consolider et/ou reconvertir celles qui existent déjà. La véritable question semble-t-il, est celle de la place de la sous-traitance comme facteur de développement technologique mais aussi de consolidation et de renforcement du tissu de la PME et, partant, de relance de l’économie nationale. Il faut savoir, ainsi, que partout dans le monde, la question de la sous-traitance nourrit des débats intéressants et complexes, et est à l’origine de stratégies d’action multiformes, soutenues par les pouvoirs publics (Etat et collectivités locales), et les différents acteurs économiques et sociaux. On ne peut ignorer de tels débats qui peuvent, en effet, nous servir de référents pour une action bien pensée et résolue dans un domaine qui peut raisonnablement susciter de l’espoir mais nourrir aussi quelques appréhensions. L’espoir demeure néanmoins permis car, de par le monde, les entreprises sous-traitantes se spécialisent, de jour en jour, davantage, améliorent leurs performances et innovent pour pouvoir répondre aux exigences des grands donneurs d’ordres au niveau international. Ce mouvement porteur de développement technologique et d’une compétitivité plus forte doit concerner aussi nos entreprises. Il s'agit pour notre pays d'entrer de plain-pied dans les chaînes de valeurs internationales et accéder aux segments à haute charge en matière grise. Ce mouvement porteur de progrès technologique, de croissance et de compétitivité devra concerner, à l'avenir, toutes les entreprises algériennes liées par des accords de partenariat. Il s’agit pour les acteurs économiques nationaux d'apporter, tout simplement, une plus grande valeur ajoutée à la nation.
par Zaïm Bensaci
Président du Conseil national consultatif de la PME (CNC/PME)
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