250 000 emplois perdus dans le secteur du textile et cuir
Le secteur du textile et cuir a connu une véritable saignée depuis l’entrée de l’Algérie dans l’économie de marché. Selon le président de la Fédération algérienne des travailleurs du textile et cuir, Amar Takjout, cette filière de l’industrie manufacturière a perdu au cours des vingt dernières années 250 000 postes de travail. «Cela est considérable pour un secteur qui doit normalement être pourvoyeur d’emploi». S’exprimant ce matin sur les ondes de la Chaîne III de la Radio algérienne, le président de la Fédération du textile a souligné que ces pertes importantes d’emplois ont touché aussi bien les entreprises publiques que privées. L’ouverture du marché national à la production étrangère a accéléré, selon lui, la déstructuration de ce secteur et le démantèlement de son outil de production «au profit de l’importation bien entendu». Ces pertes d’emplois ont été enregistrées, d’après lui, beaucoup plus dans le secteur privé que public. Les régions les plus touchées par les pertes d’emplois dans privé sont Alger, Blida, Médéa et Oran. Le secteur public a perdu 30 000 emplois dans les wilayas de l’intérieur, à savoir Tébessa, Tiaret, Sidi Bel-Abbès, Mascara, Oran et Khenchela. Cette perte d’emplois a complètement chamboulé l’équilibre régional, car chaque perte d’emploi signifie un exode certain vers le centre du pays. Actuellement, le privé a complètement disparu, affirme M. Takjout, assurant que certains producteurs privés se sont transformés en importateurs. «Importer aujourd’hui, ça rapporte plus et ça demande moins d’efforts», souligne-t-il. Le président de la Fédération du textile affirme que la politique des pouvoirs publics «n’est nullement encourageante» pour la relance de l’industrie textile. «Même les marchés publics sont raflés par les importateurs. C’est donc des milliers d’emplois financés en Chine, en Inde et ailleurs par l’argent du Trésor public algérien», dénonce-t-il, rappelant que même dans des pays industrialisés, il y a ce qu’on appelle la préférence nationale quand il s’agit de marchés publics. M. Takjout estime que le secteur dispose de beaucoup d’atouts et peut facilement reprendre et générer à la fois des centaines de milliers d’emplois, économiser de la devise et créer une plus-value pour le pays. «Les potentialités existent rien que par rapport à la structure actuelle et les usines encore en marche. Il suffit de les reprendre, les retaper et relancer la production», assure-t-il, tout en indiquant qu’il faut aussi penser à la qualification des personnes. «Il faut former des ingénieurs et des techniciens. Cela demandera trois à cinq ans. En attendant, il est nécessaire, pour le moment, de rappeler les seniors afin d’assurer le redémarrage du secteur», soutient-il. Le taux de croissance de l’industrie du textile était de 8% avant les années 90. Il est aujourd’hui de moins de 3%. Une décroissance qui pèse lourdement sur le Trésor public avec des factures d’importation de plus en plus salées.
Sonia Baker
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