Aït Ahmed n’est pas le FFS
Les langues se délient au FFS. Ali Brahimi, un ancien cadre démissionnaire de ce parti mi-démocrate mi-islamiste, fait des révélations fracassantes sur la gestion interne de cette formation qui «mourra en même temps» que son leader historique. Ce n’est pas nous qui disons cela, mais Hocine Aït Ahmed, dans une interview au journal espagnol El Pais, en novembre 1994. Par-delà les positions des uns et des autres au sein du très médiatique FFS, ce sont les comportements hégémoniques de son chef qui nous interpellent. Ali Brahimi, dans une interview à un journal arabophone, dévoile cette facette stalinienne de celui qui se présente depuis avant l’indépendance comme le chantre de la démocratie. Le mot (stalinienne) peut paraître excessif, voire outrageant, mais comment définir ce leader politique autrement lorsqu’on apprend que ses propres militants ont appris sa participation à la rencontre de Sant’Egidio par voie de presse, à l’instar du citoyen lambda ? Brahimi raconte : «Lorsque les militants et les responsables du parti à l’intérieur du pays ont commencé à ressentir la barbarie du terrorisme qui étendait ses tentacules à l’ensemble des régions, beaucoup (au sein du FFS) voulaient souder les rangs pour faire face à cette situation.» On apprend, grâce à ce précieux témoignage, qu’aussi bien la base que la classe dirigeante du FFS étaient conscientes de la grave dérive de Hocine Aït Ahmed et une poignée de ses fidèles qui avaient «adopté les thèses du FIS», s’éloignant irrévocablement de la ligne démocratique du parti. L’ancien cadre du FFS raconte sa rencontre avec le «zaïm» à Paris en 1995 ; une rencontre dont il retient surtout que Hocine Aït Ahmed ne l’a pas écouté et ne lui a «même pas laissé le temps d’exposer les grandes lignes de la crise», décrétant, sans aucun recours possible, que le Contrat de Rome – que l’écrasante majorité au sein du FFS contestait – était [la] solution. C’était, en fait, [sa] solution. Hocine Aït Ahmed se rapprochait dangereusement de la reconnaissance des actes extrémistes du FIS, sans se soucier le moins du monde de l’avis contraire de ses militants dont il ignora superbement les mises en garde contre la menace que cela faisait peser sur les fondements mêmes d’un FFS d’essence démocratique et – à l’époque – encore influent. Pourquoi ce tête-à-queue inouï d’Aït Ahmed au point de pactiser avec le diable ? «Il voulait se venger de l’armée», confirme son ancien copartisan. Aït Ahmed n’est donc pas ébloui par les idées moyenâgeuses des extrémistes religieux mais aveuglé par la vengeance contre les hommes en tenue. Mourra-t-il la rancune chevillée au corps ou se repentira-t-il d’avoir couvert les crimes du FIS ?
M. Aït Amara
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