Un édito et des interros
Par Kamel Moulfi – Nul ne peut nier à l’ANP le droit de donner son avis y compris sur le travail des journalistes même s’ils constituent une corporation particulièrement jalouse de ses libertés. Mais l’éditorialiste de la revue El-Djeïch ne se limite pas à rappeler aux journalistes les fondamentaux de leur métier ; il expose, au nom de l’ANP, une conception qui peut paraître en contradiction avec la liberté de la presse et la liberté d’expression qui en est la condition première. Il est vrai que ce ne sont pas les dérives déontologiques et éthiques qui manquent dans les médias algériens dans leur traitement de l’information, mais la corporation dispose d’un conseil de la déontologie et c’est à lui qu’il incombe de remplir le rôle de garde-fou chaque fois que la liberté d’expression n’est pas accompagnée de l’esprit de responsabilité qui, seul, fixe les lignes rouges dans cette profession. Le reste revient à la loi qui est «au-dessus de tous». C’est la quatrième fois, en quelques mois, que l’institution militaire intervient pour, d’une certaine manière, rappeler à l’ordre les journalistes. Mais jusque-là, elle avait réagi parce qu’elle se sentait interpellée ou mise en cause. On se souvient de la lettre adressée aux médias nationaux en février 2012, déjà, pour leur demander, sans doute à juste titre et au nom du «respect et de la considération envers cette institution républicaine», de ne plus utiliser l’expression «grande muette» pour nommer l'ANP. Bien plus tard, l’éditorial du numéro de septembre 2013 d’El-Djeïch a réagi aux interprétations «tendancieuses» de «certaines parties et certaines plumes» ayant traité du changement dans des administrations au sein du ministère de la Défense nationale, opéré par le président de la République. Puis, il y a quelques semaines, il s’agissait du chroniqueur d’El-Khabar dont l’écrit – pourtant dans un genre où la liberté est de mise – avait été interprété carrément comme une attaque contre l’ANP. La chronique a même été liée à une «campagne tendancieuse menée par certaines plumes contre l'institution militaire ces derniers temps» et il restait à connaître «les motifs d'une telle entreprise». La dernière leçon administrée aux journalistes par l’éditorial du numéro de novembre de l’organe central de l’ANP donne libre cours à toutes les interprétations.
K. M.
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